Kostantin se perdit en chemin lorsqu'il sortit de l'infirmerie. Les couloirs étaient vastes et les minuscules écriteaux en anglais ne lui furent d'aucun secours pour trouver le dénommé "Emett".
Il n'en savait pas vraiment plus sur les activités de l'étrange organisation qui l'avait sauvé, sinon que c'était une sorte d'école de mutants, protectionniste et, de ce qu'il avait cru comprendre, avec une pincée d'activisme. Boarf, la routine se dit-il, et tout, vraiment tout, valait mieux que la prison.
Et la patronne parlait russe et lui rappelait sa maitresse de classe élémentaire, froide et assurée comme le lac Baïkal.
Il fut tiré de ses considérations par une sonnerie impromptue: la sonnerie qui sonne la fin des cours. Et deux portes situées en avant dans le couloir s'ouvrirent avec fracas. Un flot de jeunes en sorti dont certains passèrent devant Kopka. Les plus préssés coururent sans même réfléchir, mais certains marchèrent avec un regard interloqué sur ce grand énergumène qui restait planté devant eux, au milieu du couloir. Quand tous les écoliers furent parti, Kopka continua sa route, mais deux d'entre eux, des grands, trainaient dans les couloirs.
C'était une brune et un sale môme en sweetshirt, ils devaient avoir seize ans. Kopka entendait d'où il était:
"Mais fous-moi la paix, tu comprends pas quand on te parle?
-Allez Norway, arrêtes de faire comme si je te plaisais pas.
-Mais quand je te dis non c'est non, alors tu me lâches compris!
-Commences pas à..."
Puis le garçon vit Kopka s'approcher. Il fit une mimique du visage, une mimique contrariée. Il retroussa son nez et passa sa langue sur sa lèvre supérieure: sa langue était fourchue! Il s'en alla avant de lancer à la brune:
"On se revoit ma jolie."
"Tu peux rêver." lui rétorqua-t-elle.
Kostantin était arrivé à sa hauteur alors qu'elle finissait de parler, elle se sentit obligé de le remercier:
"Merci, sans vous il m'aurait pas lachée." Elle ne semblait pas impressionnée par la stature imposante de l'homme-carapace. Elle avait parlé lentement, Kostantin avait donc compris ce qu'elle disait. Il répondit:
"Que te voulait-il?
-Oh rien, il est lourd. Il veut qu'on sorte ensemble.
-Et toi, tu ne veux pas?
-Avec lui? Pfff... plutôt mourir."
Kostantin avait fait de grands efforts pour parler un bon anglais, ça avait semblé marcher. La brune lui demanda:
"Vous êtes prof, je vous ai jamais vu.
-Je suis nouveau. Je ne suis pas prof.
-Bah alors qu'est-ce que vous faites...?
-Je fais... je fais la sécurité.
-Ah. Mais vous êtes pas d'ici, vous avez un accent.
-Oui, je viens d'ailleurs. Je m'appelle Kostantin Karskilievitch Chenkov."
La petite haussa un sourcil.
"Tu peux m'appeler Kopka."
Elle sourit.
"Je m'appelle Tana Barrett, mais tout le monde m'appelle Norway.
-Norway?
-Ça veut dire "Norvège" en Anglais. C'est une blague que les autres on fait pour se moquer de moi. Un jour en Géographie la prof à fait un cour sur la Scandinavie et elle à dit que la Norvège était un pays froid. Et les autres on dit "comme Tana!". C'est resté. Parce que je fais du froid." elle montra ses mains. Elles étaient gantées, Kopka ne l'avait même pas remarqué.
"Je ne trouve pas ça très drôle.
-Moi non plus, mais c'est comme ça.
-Je viens de Russie. C'est un pays froid aussi.
-Et toi tu fais quoi?
-Moi..." Kopka chercha l'adjectif adéquat pour décrire son pouvoir, et compte-tenu de l'étendu de son vocabulaire en anglais.
"Moi, je résiste." et il tapota du poing sur son épaule, faisant tinter le son creux d'une épaisse plaque d'os. Norway leva un sourcil, et Kopka répondit:
"Tu me trouves hideux?
-Non, ça va. Vous avez juste une sale mine, mais vous êtes gentil."
Kopka ne se souvient pas quand était la dernière fois que quelqu'un lui avait dit qu'il était gentil. Il sourit à moitié.
"Tu as des ennuis avec le garçon à la langue fourchue?
-Qui, Beacon? On l'appelle la Couleuvre, parce qu'il crache du venin et surtout parce qu'il est moche. Non vous inquiétez pas, il est collant mais il est pas dangereux.
-J'espère, sinon tu n'as qu'a me demander." dit Kopka en se redressant. Du coup la jeune écolière paraissait vraiment minuscule en face du géant à écailles. Norway roula des yeux:
"Nan, je pense que ça ira. Faut vraiment que j'y aille. Aurevoir Kopka."
Elle était déjà partie quand Kostantin murmura:
"Aurevoir."
Mais quel était cet endroit où les mutants s'acceptaient entre eux? Mais quel était cet endroits où les gens ne trouvaient pas Kopka hideux?