Adossée à l'accoudoir d'un fauteuil, les pieds battants pardessus l'autre, Chiara profitait pleinement du confort offert par l'Institut. Comme à son habitude elle s'était levée aux aurores ("pour bien profiter de la journée !") et, après une douche tonifiante, était descendue s'installer dans la salle commune pour bouquiner sur fond de soleil levant. Ou en tout cas, puisqu'on était en Angleterre, sur fond de brouillard levant.

Un saut par la cuisine lui procura assez de thé pour tenir un siège. Une fois installée Chiara ne put retenir un sourire béat : un fauteuil moelleux, une théière fumante à portée de main et un livre à dévorer. Elle se serait presque crue de retour à Milan. A deux, trois détails près. Par exemple la tiédeur ambiante italienne lui aurait évité de porter ce gros pull par dessus ces vêtements. Pull qui, bien que remplissant tout à fait son rôle, laissait à désirer coté glamour : 3 tailles trop grand, des trous partout, des manches effrangées, etc... Autant pour la réputation de fashion victime des italiennes...

Une fois parée, elle sortit un livre de son inséparable sac à malice : Exilé de Stuart Wild. L’autobiographie de ce texan de 43 ans racontait sa survie après avoir fui famille et ami pour éviter la vaccination, son exil en Amérique du Sud et les rencontres formatrices qu’il y avait fait.
Chiara se tortilla un peu pour bien imprimer son empreinte dans le fauteuil puis se plongea dans sa lecture.


***


Chiara s'étira longuement tout en baillant à s'en décrocher les mâchoires. L'horloge murale indiquait 9h30. Elle réalisa avec stupeur que près de 2 heures s'étaient écoulées depuis son arrivée. Elle n'avait vraiment pas vu le temps passer. Baillant de plus belle, elle se resservit une tasse de thé. Hum ! Encore bien chaud même après tout ce temps. Que Dieu bénisse l'inventeur du thermos !

La nuit avait été courte et il lui faudrait plus que du thé pour tenir toute la journée. Malgré tout elle n'aurait reculé l'heure de son réveil pour rien au monde. La vie à l'Institut avait tendance à être très remplie et elle n'échangerait ces heures de calme et de tranquillité pour rien au monde.
Bientôt le bâtiment allait s'animer de vie, de bousculades et de cris. Et il ne s'agissait là que des adolescents, qui sait ce que ses collègues allait bien pouvoir inventer.

Chiara ferma les yeux, bien décidée à savourer ces dernières minutes de silence.


[post ouvert en priorité aux "non-élèves" (désolée, rien de personnel ! ) pour mettre un peu en place les relations entre Chiara et les autres adultes. Voili voilou...]

Nakor dormait toujours aussi peu, après tout, plus les gens vieillissaient, moins ils passaient de longues nuits. Etait-ce parce qu'ils s'endormaient durant la journée, Nakor n'en savait rien, ce dont il était sur c'est qu'il ne faisait jamais la sieste et qu'au bout de cinq à six heures de sommeils, il ne pouvait plus rester dans son lit à ne rien faire. Alors il se levait, pratiquait un peu son pouvoir pour passer le temps et se mettait dans son vieux rocking-chair, devant sa fenêtre à observer les astres et le soleil levant. Puis lorsqu'il en avait assez d'attendre comme un vieux hibou, il se levait, prenait sa canne, mettait sa blouse blanche et parait se promener dans les couloirs de l’institut, pour aller à la rencontre d'élèves en besoin d'aides au niveau des sciences. En effet, sa longue vie passée dans les laboratoires et dans les écoles de hauts niveaux à enseigner la physique chimie lui avait donné deux vieilles habitudes : il portait toujours sa blouse de laborantin, et dispensait toujours ses conseils comme si il n'avait jamais quitté sa fonction d'enseignant. D'ailleurs il fut encore une époque où l'on demandait au vieux fou, au pied levé, de donner des cours de physiques ou de chimie, pour remplacer les professeurs officiels de l'Institut. En sommes le vieillard était connu de beaucoup de monde et assez respecté par ses pairs. C'est donc avec tout son atiraille qu'il partit arpenter les couloirs de l'institut, cherchant plus à aller prendre l'air frais de l'extérieur, car Nakor adorait le frais et le froid dont il souffrait peu. Etait-ce là aussi par la faute de son embonpoint, il n'en savait rien, mais en tout cas il préférait de loin avoir froid que transpirer et avoir chaud. Puis, après sa petite marche matinale, Nakor retourna enfin dans les bâtiments de l’institut et chercha du regard qui il pourrait bien aller embêter un peu pour faire passer le temps. Et il ne chercha pas longtemps, il trouva la une jeune femme aux cheveux et aux yeux brun, la peau légèrement doré, qui lui rappelait l'Italie. Après tout, Nakor était né et avait vécu son enfance proche de Marseille, les Italiens étaient donc des gens reconnaissables pour le vieux scientifique. Le temps qu'il s'approche, elle ferma les yeux, Nakor n'eut donc aucun problème pour démarrer la conversation

"Allons mademoiselle, il faut dormir la nuit!"

Nakor attendit que la jeune femme ouvre les yeux pour voir qui venait ainsi la déranger, puis pencha légèrement la tête sur le coté et avec un sourire chaleureux prit de nouveau la parole

"Bonjours, je crois qu'on ne se connait pas hein? On m'appelle Nakor, et vous quel nom vous donne t on et surtout, que faite vous, les yeux fermé au beau milieu de ce qui s'apprête à devenir un vrai capharnaüm?"

Nakor ria doucement, comme un gentil vieillard un peu décalé, et attendit de voir comment la jeune italienne d'environs 25 ans aux yeux du vieux fou, allait répondre.

A peine Chiara avait-elle fermé les yeux qu'une voix la fit sursauter. Pourquoi les gens se sentaient-ils toujours obligés de se faufiler ainsi en silence ? Évidemment, cette fois-ci comme les autres, la surprise avait déclenché son pouvoir. Elle se maîtrisait assez pour éviter les éclairs et autres effets tape-à-l'oeil mais pas pour empêcher l'électricité statique de se répandre dans son corps. Ses cheveux allaient être impossibles à coiffer de la journée !
Elle retint pourtant un soupir : elle ne voulait surtout pas offenser le nouvel arrivant. La maîtrise ou non de son pouvoir était son problème, ses interlocuteur n'avaient pas à en subir les conséquences. Deux longues respiration pour calmer les picotements dans ses doigts et Chiara ouvrit les yeux et se leva. Elle avait assez reprit le contrôle d'elle-même pour tendre la main au vieil homme qui se tenait en face d'elle sans risquer de lui envoyer une vilaine décharge.

"Je suis Chiara, juste Chiara."

Elle avait toujours trouvé étrange cette manie des surnoms. Cela lui semblait la première étape avant de porter une cape et ses sous-vêtements par-dessus son pantalon... Elle n'irait pour rien au monde exprimer cette opinion à haute voix mais elle regardait toujours d'un autre œil les "porteurs de surnom".

"Je ne crois pas qu'on se soit déjà croisé mais j'ai entendu parler de vous. Vous donnez des cours ici, non ? Dans ce cas nous sommes collègues."

Elle se sentit bête à la seconde où elle prononçait cette phrase. Face à ce vieil homme respectable en blouse blanche, elle se faisait l'effet d'un imposteur. Les professeurs étaient supposés ressembler à ce Nakor, sages et imposants et pas à elle qui rougissait et bafouillait lorsqu'elle s'adressait à ces élèves. Mais peut-être cette rencontre était-elle l'occasion de changer un peu les choses.

"J'adorerais que vous m'expliquiez votre méthode d'enseignement, se risqua-t-elle hésitante. Peut-être devant un thé ?"

Elle espérait ne pas s'être montrée déplacée. Elle plaqua un sourire poli mais serein sur son visage pour s'éviter l'embarras de la supplication mais ses yeux et tous ses tics ne disaient qu'une chose : "dites oui ! dites oui ! dites oui ! "

Nakor fut heureux de voir l'effet qu'il fit à sa nouvelle compagne de matinée. La pauvre enfant devait apprendre actuellement à maitriser ses pouvoirs puisqu'elle fut subitement parcourue de grandes quantités d'électricité statiques, comme le démontraient ses cheveux dressé sur la tête! Nakor fit mine de ne rien voir et écouta les propos entrecoupé de la jeune Chiara, qui était un très jolie prénom clairement italien. D'ailleurs, Nakor prononça le nom de la jeune femme à voix haute, une fois qu'elle se présenta, tout en roulant le r à la perfection et plaça quelques mots en italien

"Chiara ... Molto bella nome signorina!"

Puis dans un sourire loin d'être repoussant, mais plutôt chaleureux et paternaliste, Nakor écouta les propos de la jeune fille tout en levant la main vers la droite. En effet, tout en écoutant Chiara, Nakor déploya ses pouvoirs pour faire venir jusqu'à lui, une étrange barrette. Nakor était capable de commander aux métaux, et il le faisait depuis tellement longtemps qu'il ne réfléchissait même plus, s'il voulait qu'un métal vienne à lui, il lui suffisait d'y penser, comme quelqu'un qui voudrait mettre un pied devant l'autre, ou respirer. En effet le corps de Nakor donnait lui même les ordres aux atomes métalliques, tout cela fonctionnait en réalité en liant le champ électromagnétique émit par le cerveau du vieil homme, à celui emit en permanence par les noyaux de chaque atomes de métaux, ainsi que les légères perturbations électromagnétiques que créent les liaisons électroniques entre les particules de métaux. Etant un scientifique de talents, il connaissait assez le monde microscopique pour diriger les atomes sans plus de problème depuis pas mal d'année. Et c'est ainsi que Chiara put voir arriver dans les airs, une barrette à cheveux, qui vint atterrir dans les mains de Nakor. Celui ci s'exprima

"Si vous me permettez?"

Nakor ne posait la question que par simple rhétorique, il vint placer la barrette dans les cheveux de Chiara et ceux si reprirent leur forme initiales, comme vidées de l'électricité statique qui les parcouraient. Fier de son effet, Nakor prit place et s'exprima

"Voila qui est un peu mieux non? Cette barrette est faite en oxyde de béryllium, un isolant électrique, et qui se ferme avec une petite languette de cuivre, qui est un conducteur electrique ... le cuivre va permettre ainsi la circulation de toute l'électricité statique que vous avez accumulé dans vos cheveux, mais au lieu de l'absorber d'un coté pour la rejeter de l'autre, il va l'envoyer dans ce à quoi il est lié : l'isolant! Sa caractéristique est de piéger des petites quantités d'électricité. Et en plus, lorsque l'oxyde de béryllium est trop chargé, et bien il suffira d'attendre un peu, l'électricité qui va s'accumuler va inverser le processus d'oxydation, et avec ça, l'air autour de vous va le remettre en place en consommant l'électricité accumulé ... vos cheveux devraient donc pouvoir ne pas vous trahir tant que vous apprenez encore un peu à finaliser le contrôle de votre pouvoir Chiara!"

Nakor avait essayé de donner des explications physico chimiques claires, mais il doutait qu'elle comprenne tout le processus d'oxydoréduction chimique et de transfert de charge physique sans qu'elle ait un solide passé scientifique. De plus, Nakor avait souvent eu des élèves qui souffraient de troubles très proches de ceux de Chiara, il avait donc mis au point ce petit système et en avait quelques exemplaires encore dans l'armoire de sa chambre. Le vieillard n'avait donc peu de mérite mais espéré ne pas être allé trop loin avec ses libertés! Puis, dans un hoquet de surprise, Nakor reprit

"Ho oui ... le thé ... oui pourquoi pas?"

Nakor acceptait de prendre une tasse de thé et attendit, puisque l'invitation était venue d'elle, que Chiara lui verse de ce breuvage dans une tasse. Après tout, Nakor avait quatre vingt dix ans, il était donc plein de vieilles habitudes, et pour lui, si on offrait de prendre un verre, s'était à soi de le servir. Avec un regard amusé, Nakor attendit de voir ce que dirait la jeune femme de tout ce qu'il venait de faire, et espérait qu'elle demanderait plus de choses ou qu'elle lui donnerait des indices. En effet, si elle était enseignante d'une discipline scientifique, elle demanderait plus de choses, si elle enseignait une autre matière, littéraire ou philosophique, elle hocherait certainement la tête à plusieurs reprises ou hausserait les épaules avant d'entamer la conversation, disant qu'elle n'avait pas tout compris car elle se consacrait à un domaine précis. En sommes, le vieillard sentait qu'il allait en apprendre un peu plus sur Chiara avant de continuer à parler avec elle, d'enseignements, de méthodes et surtout, de tout et de rien! En tout cas il était intéressant de rencontrer une enseignante jeune et apparemment dynamique! Pour accentuer ses tours de passe-passe qui l'amusait beaucoup, Nakor s'était promis intérieurement de soulever à l'aide de ses pouvoirs, la tasse que Chiara lui tendrait, sans se déplacer, et en la remerciant simplement, cela lui donnerait l'occasion de rire encore un peu de lui et de ses blagues vieillottes.

Il n'y avait pas à dire, tout chez ce Nakor inspirait la sympathie. Cela venait de son sourire peut-être. Dans tous les cas Chiara l'appréciait déjà. Sans compter qu'il la flattait. Ce ne fut pas tant le compliment qui la toucha que la langue utilisée pour ce faire. Apparemment un reste de chauvinisme venait de refaire surface. C'était idiot : son interlocuteur, malgré sa prononciation, n'était visiblement pas italien. Mais tout de même, un compliment en italien lui faisait tellement plaisir ! Les mystères de l'esprit...

Avant qu'elle n'ait pu répondre, le mutant vit démonstration de son pouvoir en attirant une barrette vers lui. Passé le premier instant de surprise, elle se souvint : Nakor, l'avait-on informé, maitrisait les métaux. Malgré le temps déjà passé à l'Institut voir un mutant utiliser son pouvoir, l'étonnait toujours autant. Dans sa tête les mutants restaient des créatures étranges facilement reconnaissables à l'oeil nu (à cause de couleur de peau étrange ou d'appendices en trop...). Bien sur elle connaissait la réalité. Simplement elle n'arrivait toujours pas à se figurer totalement les faits et voir une personne "normale" déplacer un objet par la pensée ou lancer des éclairs l'impressionnait toujours autant.
Mais la démonstration de Nakor ne s'arrêta pas là, loin de là. Il lui plaça d'office la barrette dans les cheveux et un miracle s'opéra ! Chiara sentit l'électricité la quitter en quelques instants. C'était juste incroyable !

"C'est incroyable !" fit-elle, trop époustouflée pour faire preuve de plus d'esprit.

Nakor lui tint ensuite un long discours qui, apparemment, était censé lui fournir des explications sur le phénomènes. Apparemment puisqu'elle n'en comprit pas un traitre mot. Enfin si : barrette et électricité avaient réussi à franchir le seuil de son cerveau. Le reste avait été méchamment refoulé.
Aussi répondit-elle, un peu gênée, un sourire d'excuse aux lèvres :

"Vous réalisez bien sur que vous venez de gaspiller une brillante explication ? Je suis littéraire de formation. Et de cœur. Les sciences n'ont jamais été ma spécialité. Navrée."

Une moue moqueuse laissait entendre que ce n'était qu'un doux euphémisme. Réalisant qu'elle n'avait pas encore remercié Nakor pour ce cadeau merveilleux et ne voulant surtout pas paraître ingrate, Chiara reprit :

"Mais, même si je n'y comprends rien, merci beaucoup ! Vous n'imaginez pas à quel point cela va me faciliter la vie ! Grazie mille."

Ça non, il ne pouvait pas imaginer les précieuses minutes que son gadget allait lui faire économiser tous les matins. Il suffisait d'une nuit un peu agitée, de cauchemars un peu troublants et ses cheveux prenait un malin plaisir à se hérisser. Un vrai calvaire !
Les remerciements dument exprimés, Chiara se mit en devoir de désaltérer son bienfaiteur.

"Du Ceylan, cela vous va ?"

Attrapant le thermos, elle remplit deux tasse du breuvage encore chaud d'une main experte qui trahissait des années d'expérience.
Cela fait, Chiara se mit à dévorer Nakor du regard, attendant un signe. N'importe quoi qui laisse penser qu'il exceptait de lui révéler certains secrets de survie des enseignants.

Nakor écouta avec amusement la réponse de Chiara et la force avec laquelle celle ci répliqua. Nakor en prenant place explosa d'un doux rire de vieillard, lorsque la pauvre italienne s'étonna du résultat amené par la barrette. Le vieux fou était ravi de voir qu'il arrivait encore à surprendre et surtout à rendre réellement service. Mais voila que la jeune femme s'exprimait enfin avec une longue phrase intéressante, donnant des informations sur elle même. Il répondit donc dans la foulée,

"Allons allons mon enfant, jamais on ne perd son temps à fournir une explication à quelqu'un, même si ce n'est pas un initié. Ne perdez pas cela de l'esprit, car le jour où vous oublierez cela, vous perdrez votre qualité première d'enseignante : aimer transmettre son savoir sans que cela ne soit forcement demandé ou attendu!"

Nakor avait dit cela très gentiment, sans critiquer, simplement en glissant un conseil, et en rappelant qu'aucune explication n'était jamais donné pour rien, et que transmettre un savoir se faisait sans contre partie, et puis Chiara avait négligé qu'à son âge, Nakor n'avait plus de temps à perdre, sa vie avait été pleine, et chaque seconde qu'il passait encore debout était bien au contraire du temps gagné et jamais perdu! Il avait en plus utilisé le terme mon enfant, comme le vieillard qu'il était, car vue de son point du vue, tout le monde etait jeune face à lui, mais cela n'avait rien de diminutif ou d'abaissant. La jeune femme avait ensuite remercié le vieil homme de sa petite solution, qui semblait vraiment venir soulager sa vie de belle femme qui se devait de tenir sa chevelure aussi bien que tout le reste. Nakor, dans son petit niveau d'italien compris aussi les deux derniers mots, il ajouta donc

"Ma di niente mia cara!"

Et voila qu'elle lui tendit une tasse de thé avec un très bon choix et surtout une belle cuillère en métal posé sur le coté, Nakor, un sourire sur les lèvres, glissa à son tour

"Et bien merci pour ce bon thé Chiara."

Tout en disant cela et en prononçant comme toujours le nom de la jeune femme à l'italienne, en roulant le r légèrement, il prit contrôle de la cuillère, la souleva dans les airs, lui ordonna de s'étendre un peu, puis passa sous la tasse, Chiara lâcha la tasse et celle ci, en équilibre parfait sur le métal étendu, s'éleva jusqu'à la bouche de Nakor, celui ci, gardant sa concentration, souffla dessus pour le refroidir et glissa juste avant de boire

"J'aime le thé tiède, ou chaud, mais pas bouillant, cela lui fait perdre son coup, à cause de la combustion des particules qui contribuent à lui donner son gout!"

Un clin d'œil à Chiara et toujours sans les mains, Nakor but une bonne gorgé de ce très bon thé et laissa la tasse aller se poser sur la table. Il avait en même temps une fois de plus glissé une explication scientifique, comme pour appuyer ses propos de tout à l'heure, montrant qu'en temps qu'enseignant passionné, il fournissait toujours des explications, quitte à être barbant! Puis il prit une fois de plus la parole

"Ainsi vous êtes enseignante en littérature ma chère? Cela doit être passionnant, lorsque nous recevons notre formation de scientifique, nous sommes toujours amenés à nous intéresser à la philosophie et aux lettres, car un scientifique doit savoir s'exprimer pour expliquer, et avoir de la culture. J'avoue donc être passionné de lecture. D'ailleurs à ce propos, je trouve regrettable qu’à l'inverse, afin de vous ouvrir encore plus l'esprit, vous ne recevez pas non plus de formation scientifique, même très basique. Enfin, vous me direz ... qu'importe la façon de voir les choses d'un vieux fou hein? Mais bon avec l'âge, je me permets d'émettre des avis partout tout le temps, venant mettre mon gros nez dans les affaires des autres!"

Un petit rire vint couper ce discours avant que le vieil homme continue, aprés avoir donné son avis sur la formation itinial de chaque matiere, afin qu'ils puissent ensuite confronter leurs idées

"Mais quelle branche des lettres enseignez vous? Et depuis combien de temps, car je trouve toujours très intéressant de confronter nos manières d'enseigner et de transmettre, je suis personnellement de la vieille école, pour moi un bon cours ne peut se dérouler sans certains pré-requis, le premier d'entre eux est que c'est l'enseignant qui est là pour faire son boulot et pas les étudiants, c'est donc à nous d'assoir dans un premier temps notre autorité en exécutant très vite une menace clairement énoncé! Tout les ans, dés mon premier cours, j'informe mes élèves que ceux qui parlent en même temps que moi, trop fortement, seront punis, et cela ne loupe pas, peu après le début du cours, au moins un élève parle trop fort, et il se prend une punition mémorable, qui fait mouche dans l'esprit de tout les autres et qui me fixe comme étant un méchant! Ce qui est un atout au départ, ensuite, je montre que finalement je vis pleinement mon métier, c'est à dire la passion de transmettre, et surtout la non peur absolue du ridicule. Au fil du temps passant mon temps entre travail intense et amusement ... c'est un fil sur lequel on marche tout le temps, entre rire avec eux et les faire travailler, du coup avec le temps j'arrive à faire en sorte que mes petits élèves se disent : mince mais en fait il n’est pas méchant au contraire il est super gentil ce prof. Alors que je ne le suis pas forcement plus qu'un autre, mais comme au départ ils m'ont prit pour le pire de tous, dés qu'il y a un contre pied, ils prennent complètement l'opposé et intensifie ma gentillesse!"

Nakor ria encore de ses propos, en fait c'était un vieil arnaqueur qui mentait à ses élèves afin de les manipuler et qu'ils viennent dans son sens et non l'inverse

"Oui, je sais Chiara, finalement je suis un vieux manipulateur mais ... croyez moi, faite croire à vos élèves que c'est eux qui viennent vous voir parce qu'ils ont besoin de vous et certainement pas l'inverse ou une quelconque obligation de présence, et vos cours se dérouleront beaucoup plus facilement! Mais cela vient avec le temps ... pensez vous vraiment que la pédagogie puisse se transmettre et qu'une seule méthode est la bonne?"

Nakor posait vraiment la question, comme si finalement il connaissait Chiara depuis des lustres et qu'ils menaient tout les deux une petite réflexion de comptoir, entre amis, sans se soucier de rien d'autre. Dans tout les cas Nakor appréciait grandement ce moment, lui qui était un fieffé bavard, il avait en plus trouvé une auditrice sympathique et très intéressante.

Chiara ne put retenir un léger sourire en voyant Nakor faire une nouvelle démonstration de son talent. Voila au moins une chose commune aux mutants et aux humains : le besoin de d'épater la galerie. Le fait que le démonstrateur soit un vieil homme limitait tout de même le coté "frime adolescente".
Elle eut à peine le temps d'attraper sa propre tasse de thé avant de se concentrer sur le discours de Nakor.

Sa méthode à lui reposait sur l'autorité et une certaine rigueur... Elle aurait vraiment aimé qu'il lui livre la recette miraculeuse de l'enseignement réussi. D'ailleurs peut-être était-ce le cas mais elle serait alors bien incapable de l'appliquer. Autorité et rigueur ? Autant renoncer tout de suite !
Elle entreprit tout de même de répondre aux questions de son loquace interlocuteur.

"J'enseigne la sophrologie, le contrôle de soi."

Elle eut un sourire gêné et rosit légèrement en repensant à sa petite perte de contrôle un peu plus tôt.

"Malgré ma petite démonstration lorsque vous êtes arrivé..."

Reprenant contenance elle poursuivit.

"Je suis sure que votre technique est excellente mis j'avoue privilégier le dialogue avec mes élèves. Ils doivent se sentir compris et écoutés dès le premier cours. "

Pour être tout à fait honnête Chiara n'avait aucune "technique". Cela venait surement avec les années mais pour le moment elle bidouillait au début pour essayer de mettre ses élèves à l'aise. Ceci malgré le stress qu'elle ressentait elle-même. Passé les premiers cours, elle avait pris la mesure des ses élèves et avisait en fonction d'eux. Heureusement pour elle que les jeunes mutants étaient souvent là par choix et avaient une réelle volonté d'apprentissage. Elle préférait ne pas imaginer le résultat de cette méthode devant une classe des lycéens normaux...

"Je n'ai aucun diplôme en fait... C'est juste... (sourire gêné et nouveau rougissement) J'ai appris à contrôler mon pouvoir seule et je me suis dit que je pourrais être utile ici..."

Face à ce vieux professeur sur de lui et de sa méthode d'enseignement, Chiara se faisait l'impression d'un imposteur. Avouer ce fait l'embarrassait toujours. Elle redoutait qu'on lui demande alors quelle raison l'avait poussé à venir. Crainte justifiée par le fait qu'elle n'en savait rien. Elle était venu sur un coup de tête. On avait déjà trouvé mieux comme raison !

Nakor, après ses longs discours s'intéressa aux propos de la jeune italienne! Et voila que bien des choses se dévoilaient avec un certains humour puisqu'il semblait que Chiara faisait preuve d'autodérision. C'était là un atout non négligeable pour l'enseignement, et Nakor lui ferait remarquer plus tard, dans tout les cas le vieil homme explosa de rire aux premiers propos de la jeune femme, en effet son lien entre sa matière d'enseignement et sa capacité à maitriser son pouvoir fit rire le scientifique, mais pas par moquerie, plutôt par appréciation de la petite blague qu'elle venait de glisser. Pour ne pas offenser la jeune femme il glissa donc

"Vous êtes très drôle ma chère et en plus vous savez rire de vous même c'est excellent! La capacité d'un enseignant à vivre avec conviction son ridicule est très importante, sans cela, la durée de vie d'un professeur est très limité, ou en tout cas sa durée de vie mentale ... dans un état de dégradation encore acceptable!"

Et voila que Nakor ria encore de ses propres mots cette fois! Puis il écouta la suite du dialogue et décida de répondre aux questions sous-jacentes de Chiara, sans prétendre que sa méthode était la bonne

"Ho, la sophrologie, mais cela doit être très intéressant dite moi? J'aime m'intéressé à tout, surtout qu'à mon âge, il est grand temps d'ouvrir son esprit au reste des choses qui nous sont resté opaques! Mais ne rougissez donc pas de vos diplôme, la vie apprend plus de chose que l'école, et se débrouiller seule, mutante, dans un monde qui n'est pas encore prêt à nous recevoir et qui tente, bien au contraire de "solutionner le problème mutant" ... c'est clairement à saluer. Je suis venu au monde il y a quatre vingt dix ans Chiara, à cette époque lorsque nous étions découvert, nous passions bien sur pour des monstres, mais on cherchait plus à nous cacher au reste du monde, sans trop nous malmener ... maintenant les choses ont changé! Et puis maitriser un pouvoir tel que le votre à du être fort complexe, sachant que ... vos cheveux réagissent de manière naturelle, et voila donc une chose que vous n'auriez jamais trop pu contrôler ma chère, pas de honte à avoir là dessus, si les maitres de l'instituts vous ont accepté, c'est que votre place est bien là!"

Nakor menait un discours qui se voulait rassurant mais qui était franc, le vieillard avait depuis longtemps passé l'âge de mentir pour réconforter ou autre, non, il disait ce qu'il pensait, peu importe si cela faisait plaisir ou non! Mais Nakor pensait que Chiara devait être bien plus respectable qu'elle ne voulait le montrer et puis, elle lui était très sympathique et touchante! Etant un affreux bavard et profitant de la présence d'une littéraire à ses cotés, il se mit à parler de leur sujet commun

"Vous savez, je ne prétends pas que ma méthode est la seule, d'ailleurs avec le temps qui passe et mes bientôt un siècle de vie, je suis sur d'une chose : l'enseignement ne peut ni se transmettre ni s'expliquer! Face à nos élèves, au fond de nos classes, seuls avec eux, nous nous formons, en nous adaptant et en vieillissant, nous parvenons, à reconnaitre le genre d'eleve qui se retrouve devant nous! Et selon ce que nous avons à prendre en compte, nous changeons de pratique! Selon les classes, j'ai eu aussi souvent à paraitre sous les traits d'un tyran, que d'un gentil grand père qu'on peut légèrement manipuler! Mais il y a autre chose dont je suis sur : si vous faites preuve de trop de gentillesse dés le départ, croyez moi, vous aurez très vite la réputation d'être la prof dans le cours de laquelle on peut faire ce qu'on veut! Et, si pour l'instant votre public vous est acquis, parce que les mutants se sentent chassé et ont peur d'être mêlé au monde extérieur, il y a aussi dans nos rangs, des élèves très durs, qui ont vécu des choses trop fortes pour qu'ils soient de bons petits! Des enfants compris et écouté vivent mieux et lient très vite des liens important avec la personne qui se comporte de la sorte! Mais un enseignant ne doit jamais devenir un ami, il doit devenir un symbole de respect. La nature humaine est ainsi faite, nous courrons toujours après ce que nous ne pouvons pas avoir Chiara, cela est identique avec un enseignant : s'il est trop accessible, on ne va pas s'y intéresser très longtemps et on se lassera de lui, par contre s'il semble légèrement froid et loin, mais qu'on sent qu'il y a quelque part une légère ouverture, un minuscule moyen de devenir son ami, alors tous les élèves vont aimer cet enseignant! Il faut donc, si l’on ne sait pas être méchant, ne pas hésiter au moins une fois à faire un exemple, pour montrer aux élèves que, et bien oui, on peut les punir s’ils ne jouent pas à notre petit jeu correctement. Que dites vous de cela?"

Nakor avait posé sa question avec une réelle sincérité, se grattant son menton râble à souhait! Il avait rarement eu l'occasion de mener une telle discussion, chaque enseignant de son époque pensant que sa propre méthode était celle de tous, jamais on ne partageait ce genre de discussion. Le scientifique était donc content de pouvoir confronter son vieux point de vue à celui d'une jeune philosophe.