[RP] Non ...

Pouvoir · Type Sigma

12 février 2052

Virginie était statique devant la porte d’entrée. Elle en détaillait la forme, les marques du temps, depuis cinq bonnes minutes. La clé électronique patientait entre ses doigts. Le couloir était désert. Les locataires étaient probablement entrain de prendre les transports pour rentrer chez eux. Son père était probablement entrain de se préparer pour partir faire sa garde de nuit. Sans aucun signal la jeune fille passa le seuil et avança droit vers le salon. Enfin salon… c’était un petit loft. Une centaine de mètres carrés que son absence condamnait à la décrépitude. Ils ne l’avaient pas quitté depuis presque dix-neuf ans.

Son père la remarqua en premier. Ses mains longues cessèrent toute activité. Il se redressait. Ses traits montraient une suite d’émotions un peu chaotique : surprise, incompréhension, soulagement… Oui il avait l’air soulagé. Cela faisait plus d’un mois que Virginie n’était pas venue ici. Elle n’avait pas donné de nouvelle en revenant de la zone 56. A quoi bon ? Alison remarquait que le son lancinant des outils ne la berçait plus. Alors son regard quittait la fenêtre…

-« Qu’est-ce que tu fais là ? Tu devrais être dans l’avion ! »
Elles se ressemblaient tellement toutes les deux. Le regard, la forme du menton, jusqu’à la manière d’attraper un accoudoir de fauteuil. Mère et fille qu’elles le veuillent ou non.
-« Je ne vais pas prendre cet avion maman et je ne vais pas aller dans ce centre. »
L’époux, le père, se levait en silence comme pour prévenir un danger. La situation était assez inhabituelle pour l’alarmer. A quand remontait la dernière fois que Virginie avait contredit sa mère ? Celle-ci eu un petit ricanement mauvais.
-«J’aurai dû m’en douter. Coir jusqu’au bout. Tu n’es vraiment bonne à rien. »
Le cœur de la mutante se contractait. Elle retenait une défense qu’elle savait vaine contre ce discours qu’elle entendait régulièrement depuis… l’accident ? Non depuis que le gène X avait été dépisté. Mais aujourd’hui les choses devaient être dites.
-« J’aide à ma façon. Et… tu ne veux pas le comprendre. »
Les magnifiques yeux bleus de madame Parish brûlaient de colère. Ce sentiment diffusait assez d’énergie dans son corps pour qu’elle se mette debout dans un mouvement plein de menace. Cette femme n’avait pas besoin de pouvoir spécial pour dominer la chair de sa chair.
-« Tu aides?! En allant prendre des cours qui ne te serviront à rien. En jouant à la fille modèle comme si tout allait bien. Tu n’aides personne. Tu n’es qu’un parasite. Une égoïste. »
L’homme de la maison gardait le silence. Il connaissait assez bien sa femme pour ne pas chercher à la contredire maintenant. Elle avait toujours été revêche. C’était bien pire depuis qu’elle souffrait physiquement. Leur fille attrapait une enveloppe dans son sac et la posait sur la table. Cette enveloppe contenait comme pour chaque mois les deux tiers de son salaire et aujourd’hui 1500 € supplémentaire.
« Tu crois que ton argent réglera tout? Tu crois que ça t’épargne de remplir tes obligations ? »
Le cœur des deux femmes, était aussi rapide l’un que l’autre, mais certes pas pour la même raison. La demoiselle gardait une attitude calme et contrit unique rempart qu’elle connaissait.
-« Non, ça ne fait pas tout. Mais je ne peux pas faire plus maman. J’aurais voulu. Mais je ne peux pas. »
Alors qu’elle sentait ses résolutions fondre sous la culpabilité encore une fois. Virginie était terrifiée à l’idée de céder.
« Menteuse. Sale menteuse. »
Il fallait qu’elle s’en aille avant de dire des choses qu’elle n’avait pas envie de dire. Son regard se posait un instant sur monsieur Parish. Il brillait légèrement. Une douleur extrême s’y logeait. Parce que… A côté de l’enveloppe était déposée la clé de l’appartement. Le silence. Un silence cristallin qui laissait à ces deux individus le temps de comprendre une chose essentiel.
-«Je suis venue vous dire au revoir. Ou plutôt adieux. Je ne reviendrai plus ici.»
La nouvelle ne l’étonnait pas. Tôt ou tard cette jeune fille allait comprendre que…
«Espèce d’. »
-«D’ingrate.»
-« Tu ... »
-«Alison… »
-« Elle nous … »
-«Elle est majeure Ali’ »
Virginie était surprise. C’était la première fois que son père… prenait parti. Il ne la regardait pas. Il avançait vers son épouse pour l’arrêter dans sa démarche. Malgré les brûlures elle était encore vive. L’énergie ne mademoiselle Parish venait bien de quelque part.
-« Eh bien si c’est comme ça part ! Va crever avec tes monstres. »
-«Ils sont bien moins monstrueux que toi maman.»
Cette fois les deux parents eurent un même air halluciné. La voix douce de leur fille. Celle qui ne disait jamais un mot plus haut que l’autre. L’étonnement faisait durer le silence. Avant de perdre tous ses moyens la petite mutante ajouta quelques mots.
-«J’espère que vous le comprendrez un jour. Je n’ai pas choisi ce que je suis. Mais j’en suis fière. J’en ai assez de lutter pour avoir droit à votre amour ou à votre respect. Tu as gagné maman. Je deviens aussi égoïste que tu le voulais. Mais surtout ne les insulte pas. »
-« Sinon quoi Virginie ? »
Le ton était si amusé. Alison avait l’impression d’avoir un rejet d’une crise d’adolescence inexistante. Elle ne croyait pas une seconde que tout cela soi vrai. Elle n’eu d’abord le droit qu’à un triste sourire.
-«Sinon, moi non plus je ne pourrais plus, ni te respecter, ni t’aimer.»
Ses jolis yeux se posaient une dernière fois sur son père. Puis elle quitta la pièce… sans se retourner.