Salut les monstres ! Delta sur vos six heures. Suivez l'émetteur sur cette fréquence. Déviez d'un poil et on vous expédie sur Mars les horreurs...

Les pilotes de chasses avaient peut être une voix déformée par leur masque à oxygène, mais la patrouille Delta devait avoir été sélectionné pour ses intonations qui tenaient plus du robot que de l'humain normalement constitué ! Quel qu'il en soit et environ deux minutes après le passage de la frontière, le jet des confréristes fut aussitôt pris en charge par des guides particulièrement agréables. Une demie d'heure de vol sans histoire et l'appareil se posa à la verticale sans le moindre problème, salué par un majeur dressé par le leader de la patrouille Delta...

Contrairement à ce qui avait été sous entendu, les confréristes ne s'étaient pas posés à Chicago même, mais en rase campagne, à une bonne dizaine de kilomètres de la ville. Il faisait chaud, le soleil tapait sans retenue sur la carlingue du jet. Cela changeait agréablement du Canada ! Lorsque la rampe arrière s'abaissa, Terry, Maria et Twikjeya s'aperçurent qu'ils s'étaient posés à environ deux cent mètres d'une tente de l'armée US. Le genre de tente qui abritaient au moins un général et son état major, les trois blindés qui l'encadraient et la bonne centaine d'hommes lourdement armés constituaient une preuve suffisante... De même, les bosses sombres sur la crête de la petite colline n'étaient sans doute pas des amoureux enlacés sur le sol mais plutôt une bonne dizaine de snipers qui frémissaient déjà à l'idée de presser la détente...

Un sifflement déchira le ciel environ trente secondes après l'atterrissage. Un autre jet, semblable en tout point au premier, atterrit avec la même précision millimétrée à trois mètres de celui des confrères, à croire qu'ils étaient dirigés par la même personne... Twikjeya coinça une mèche rebelle derrière son oreille dépourvue du moindre ornement (!), aussi soucieuse des snipers que de sa première coupure.

L'Institut a visiblement été convié lui aussi...

La sombre dame activa du bout de son doigt l'oreillette que tous portaient, vérifia que ses lames étaient bien engagées dans leurs étuis et souleva sa sacoche pour la passer en bandoulière, tandis que le vent ruinait à néant ses efforts de coiffures sobres et correctes. Comme toujours, Twikjeya restait à l'écart, quelques pas derrières ses deux confrères, peu désireuse d'avoir l'air de prendre la tête des opérations... D'autres auraient murmuré que c'était pour éviter de croiser le regard de Maria. Peu importe ce qu'ils pensaient... La dame des glaces était sobre, silencieuse, et avait visiblement l'intention de rester aussi laconique qu'en temps ordinaire...

[HJ : Oui parce qu'il fallait bien un titre !]
[HJ : Ce n'est pas un post de Twikjeya mais le post du mdj, ce qui explique la brièveté et le désintérêt pour la malheureuse ^^]

Les yeux camouflés en partie par sa capuche blanche, Maria examinait le terrain sur lequel ils avaient été conviés à atterrir. Que signifiait donc ce guet-apens à peine dissimulé ? Des soldats surarmés, des tanks dernière génération… On préparait une guerre ici ou quoi ? Tout cet attirail pour trois idiots, c’aurait été risible si seulement elle n'avait pas fait partie de ces trois idiots !
"_ C'est bon signe, murmura-t-elle du bout des lèvres, en se comportant ainsi, ces inferiors nous montrent combien ils ont peur de nous !"

Tiens, on leur avait également assigné des snipers ? Délicate attention ! Bon, très bien… Rester cool… Maria avala sa salive. Ce n’était pas le moment de flancher.
"_ Nous avons l’avantage psychologique, murmura-t-elle à nouveau à l’adresse de ses deux confrères, eux ne savent pas de quoi nous sommes capables…"

Et de quoi étaient-ils capables au juste contre un tank dernière génération ? Un tank dernière génération, ça ne saigne pas… Un tank dernière génération, ça se marre quand on l'attque à coup de lames métalliques… Un tank dernière génération ça continue à avancer même couvert de boules gluantes…
L’avantage psychologique, certes ils l’avaient… Mais était-ce suffisant pour compenser leur handicap de départ ?
Le jet de l’Institut vint se poser à côté de leur propre jet ; Maria se surprit à apprécier leur venue ! Elle pria pour que Lemington aie été plus maligne que Kenjiss et qu’une armée de cinquante molosses tous doués de super force sortent de l’appareil, blindés de la tête aux pieds.
Toujours pas de mouvement du côté des petits soldats. Maria soupira.
"_ Bon, je suppose qu’ils ne nous ont pas demandé de venir juste pour tester la visée de leurs fusils snipers… Allons voir ce qu’ils nous veulent tous ces beaux militaires."

Maria fit quelques pas vers la tente de gradé. Elle espérait que son costume immaculé résonne dans l’esprit étriqué de ces porte-flingues comme un drapeau blanc de trêve. Elle s’arrêta un instant pour préciser à ses compagnons :
"_ Qui m’aime me suive…"

Puis, sans se soucier de savoir si elle était vraiment épaulée, Maria s’approcha du premier soldat venu. Une espèce de gorille au regard vide et lointain agrippé à son fusil d’assaut comme s’il eut été son premier doudou.
"_ Nous sommes les représentants de la Confrérie Moderne, déclara-t-elle sur un ton solennel, sollicités de toute urgence par les instances supérieures du BCGDCA en vue de résoudre la situation liée à l’incident de l’Aéroport de Chicago. Conduisez-nous jusqu’au commandant de ce détachement."

Elle ne jugea pas utile d’ajouter « s’il vous plaît ». Après tout, il aurait été étonnant que ce trouffion soit habitué à ce genre de politesse.

Pour une fois, Terry devait bien reconnaître que Maria avait fait vite. Très vite. Car au lieu de la demi-heure habituelle qu’elle leur imposait systématiquement avant chaque départ en mission, elle était arrivée dans les délais au Jet. Miracle ! Il nota quelque part dans un coin de sa tête de la stresser un peu plus souvent. La méthode avait l’air efficace…

Kenjiss leur avait assuré qu’il les surveillait et pour ça, il lui faisait confiance. Son teint blafard n’avait pas échappé à l’œil du Caméléon mais il connaissait aussi son leader, s’il avait des problèmes il n’était pas du genre à en faire part. Terry décida donc de mettre ça de côté. Il s’en préoccuperait plus tard.

Dans le hangar, Twik’ les attendait déjà. Elle avait préparé tout ce dont ils auraient –probablement- besoin. Terry lui n’avait pris que sa combinaison à incorporation cutanée (très pratique, elle absorbait également son camouflage, ce qui lui évitait entre autre de devoir se balader à moitié à poil lors de missions).

"Non, Twik’, nous ne prendrons que le strict minimum. C’est risqué, mais cela montrera notre bonne volonté. Nous serons probablement… accueillis comme il se doit. En débarquant non armé, surtout si ce sont eux qui nous ont vraiment convoqués, cela devrait éviter une bataille sanglante ou tout au moins, retarder une confrontation qui pourrait s’avérer regrettable."

Le mutant n’attendit aucune remarque et/ou protestation. Sa décision, même si relativement peu ingénieuse, n’était pas discutable. Ils avaient été conviés plus ou moins... cordialement. A eux de leur montrer, malgré la menace dont ils seraient la cible, qu’ils en étaient parfaitement capables.

Maria et Twik s’étaient installées à l’arrière du Jet tandis qu’il prenait les commandes. Quelques minutes plus tard à peine, ils s’élevaient déjà au dessus de Vancouver. Et dans un déplacement d’air à faire pâlir Superman de jalousie, le Jet de la Confrérie fendit le ciel canadien, direction Chicago. Ou plus précisément le lieu d’atterrissage qu’on leur avait fournit, légèrement à l’écart de la ville. Il ne fallait pas alerter la population. Ou bien espéraient-ils garder la venue de la Confrérie secrète ? En vue de mieux les éliminer… en cas de problème. L’hypothèse n’était pas à écarter… « Disparition regrettable… inexplicable… et blablabla » Terry voyait déjà d’ici les dirigeants de la BCGCDA se frotter les mains. Il soupira. Il était trop tard pour faire demi-tour, deux petits points sur son écran de détection l’avertirent qu’ils étaient à présent suivis.

Le vol fut rapide et bien… encadré. Ils se posèrent moins d’une heure plus tard sous bonne garde et après les derniers récapitulatifs de sécurité, Terry claironna –histoire de détendre un peu l’atmosphère :

"Tout le monde descend !"

Inutile de vous préciser que l’effet escompté ne fut pas trop au rendez-vous ? Lorsqu’ils sortirent, ils purent admirer la haie d’honneur qui les attendait.

*quelle charmante attention* ironisa Terry

Puis se tournant vers ses compatriotes :

"Je trouve qu’ils en font quand même un peu de trop… Tout cela pour 3 malheureux mutants… C'est pas comme si on venait pour leur arracher la tête"

Car non, ce serait plutôt le contraire. Oui, le Caméléon était lucide. En cas d’attaque, ils étaient morts ! Contrairement à ce que semblait encore penser Maria. Ah l’insouciance de la jeunesse… Il décida néanmoins de lui remettre les pieds légèrement sur terre. La demoiselle semblant bien plus habituée aux belles paroles qu'elle prononçait qu'aux réelles missions sur le terrain.

"Maria, j’espère vivement que tu réalises que face à un tel escadron, nous n’avons absolument aucune chance. Alors… je te prie aimablement de modérer tes ardeurs. Je ne tolérerai aucun dérapage. Nous sommes loin d’être en situation de force."

Un sifflement assourdissant interrompit son sermon et le mutant se retourna pour en distinguer la source. Lorsqu’il aperçut le Jet de l’Institut, il se sentit presque rassuré. Presque parce que la situation s’annonçait de plus en plus étrange, mais au moins, ils venaient certainement de gagner en puissance. Il savait que la Cerbère ne délaissait que très rarement son équipe lorsqu’elle s’engageait sur le terrain. Il y avait donc de fortes chances qu’elle soit à bord. Et même s’il ne l’appréciait pas particulièrement, sa présence pourrait pour une fois se révéler utile.

"Honnêtement Twik’, pour le coup, je suis content de les voir là aussi… " murmura-t-il à l’attention de la mutante slave.

Un grésillement au niveau de son oreille l’avertit qu’elle avait activé leur communicateur miniaturisé. Bien, au moins pourraient-ils rester en communication quoiqu’il arrive. Maria, en tant que porte parole prit les devants et sollicita une entrevue avec les supérieurs du camps d’acceuil. Il était plus que temps de savoir à quoi rimait cette mascarade et découvrir qui les avait vraiment appelés ! Emboitant le pas à la jeune Russe, Terry fut également suivi par Twik’. Le caméléon laissa la jeune Russe se débrouiller. Après tout la communication c’était son domaine. Lui ne veillait, pour le moment, à ce que rien ne dérape. Et Twik, fidèle à elle-même se tenait derrière eux en silence. Mais Terry ne doutait pas qu’elle serait apte à réagir en cas de nécessité, au moins pour leur laisser le temps d’improviser une contre attaque quelconque…

Derrière eux, le Jet de l’Institut s’ouvrit et ses premiers occupants mirent pieds à terre, Lemington en tête. Imperceptiblement, Terry poussa un réel soupir de soulagement. En cas de débordement, ils avaient à présent de quoi riposter…

A l’instar de leurs très chers amis Confréristes, le Jet de l’Institut fut également largement escorté jusqu’à leur point de chute, à quelques kilomètres de Chicago. Le voyage se déroulait aussi calmement que le permettait la situation. Atmosphère lourde et oppressante à souhait. Ils avaient à peu près tous conscience de se lancer dans une affaire pas très nette. Mais avaient-ils sincèrement le choix ? Aujourd’hui, il y avait encore eu des morts… dont un mutant. Ils devaient réagir. Il s’agissait là de leur devoir…

Samarah activa le pilotage automatique pour les dernières minutes de vol et rejoignit son équipe à l’arrière du Jet pour les dernières recommandations.

"Nous allons nous poser d’ici quelques minutes. Nous sommes déjà escortés comme des fugitifs en cavale. Nul doute qu’on nous attend à l’arrivée, ne soyez pas surpris par la teneur de l’accueil."

La mutante devinant parfaitement le genre d’accueil que pouvait leur réserver l’armée, malgré leur convocation. Son regard s’assombrit légèrement et ses traits se durcirent, accentuant davantage la pâleur de son visage. Un teint qui ne la quittait désormais presque plus depuis quelques jours. Même un œil non expérimenté aurait pu déceler l’état de santé de la jeune femme. Celle-ci n’allait pas bien… Mais pour le moment, sa santé ne comptait pas.

"Equipez-vous normalement. Ne prenez que les armes nécessaires. Plus nous irons légers, moins ils nous soupçonneront. Et n’oubliez pas votre communicateur. Je vous garderai en relation télépathique, mais peut-être ont-ils prévu des inhibiteurs à champs larges. Si vous vous sentez soudain dépossédés… Essayez de rester calme. Cela ne sert à rien de leur montrer qu’ils ont l’avantage."

Elle avait bon dos pour motiver ses troupes, mais elle-même se demandait ce qu’elle pourrait bien faire si elle se retrouvait dénudée de ses capacités. Si en combat mental, Samarah s’avérait être un adversaire redoutable, c’était loin d’être le cas lorsqu’elle était amenée à se battre au corps à corps. Pour ça, il y avait June. Qui n’était malheureusement pas là…

La jeune femme ajusta sa combinaison tandis que le Jet se posait dans un nuage de poussières dont même la plus assidue des ménagères n’aurait pas pu venir à bout malgré ses efforts. Et lorsqu’elle posa pied à terre, elle sentit subitement un filet invisible se resserrer autour d’eux en apercevant un autre Jet, bien trop connu à son goût ! Un pressentiment…

Visiblement la Confrérie avait également été conviée.

Et le côté rassurant de cette initiative fut rapidement englouti par la gravité qu’une telle constatation supposait. D’autant que… après un rapide coup d’œil aux effectifs envoyés, Kenjiss ne semblait pas être de la partie. Samarah plissa son front, un instant plus suspicieuse que jamais, avant de se reprendre. Non, ce n’était pas possible… Il ne serait quand même pas allé jusque là… Il s’agissait sans doute d’une coïncidence… Le mutant devait sans doute régler quelques affaires dans un coin reculé de la planète. D’ailleurs, trop occupée à se calmer pour ne pas alarmer les autres, elle n’envisagea pas une seule seconde la nature de cet ailleurs. Si elle avait su…

Samarah se garda de faire part à son équipe de ses soupçons et elle analysa la situation d’un rapide coup d’œil. Cerné de toute part. Bien. Au moins ils étaient fixés. Un petit test s’imposait. Tout en avançant, ses compagnons derrière, elle émit 3 flèches mentales, discrètes et précises :

*Loup-loup sommes-nous déjà dans ta gueule ?*

Et elle attendit leur réponse avant de poursuivre

*Si cette voie de communication nous est coupée, à mon signe, repliez-vous. Sans m’attendre*

Le signe de secours, ils le connaissaient tous. Elle leur avait expliqué dans le Jet. Simple mesure de précaution supplémentaire. Et ils savaient qu’elle avait toujours été très clair là-dessus. Il valait mieux une seule victime que tout le groupe. Parmi les défauts de Samarah, on pouvait compter sans nul doute, l’orgueil et le goût du risque. Pour une tête brûlée, c’était bien évidement le minimum.

La jeune femme arriva à hauteur du groupe de Confréristes, parmi lesquelles elle reconnut immédiatement Maria et Terry. Elle les salua froidement, comme à son habitude, sans pour autant les dénigrer. Les circonstances aidant, les uns comme les autres devinaient sans peine qu’ils étaient leurs seules chances de survie respective si la situation dérapait. Puis, elle reporta son regard sur la troisième personne présente. Elle, en revanche, demeurait une parfaite inconnue. Ses yeux s’attardèrent sur l’étrange femme toute de noire vêtue, la transperçant presque de part en part, le temps de la dévisager avant de retourner se planter sur leurs futurs ennuis en perspective. En l’occurrence, une espèce de m’as tu vu de soldat, dont le niveau d’intelligence devait friser avec celui d’une limace… Et encore. Une moule serait plus appropriée.

"Quant à nous, nous sommes envoyés par l’Institut, conformément à votre appel. Il serait temps, je crois que vous nous expliquiez les raisons de notre… déplacement "

Pour ne pas dire autre chose…

Sa déclaration avait été simple et directe. Sa voix, terne et lointaine. Elle n’avait pas l’habitude des discours élaborés de Maria. Pour elle, l’important était d’aller droit au but. Qui a pensé comme un éléphant dans un magasin de porcelaines ?

Des réponses avaient été données, mais ce qui avait été dit était-il de bonne augure ? Pas trop, en tout cas pas pour Camille, elle maîtrisait son pouvoir sur l’eau, avec l’eau… et là, malgré la proximité du lac, il serait sur terre. Tout ça allait trop vite, elle aurait préféré avoir une solution de repli défini. Alors qu’ils n’étaient pas encore dans le jet, elle était déjà au téléphone, parlant à voix base, comme si elle complotait quelque chose.
Une solution de repli, voilà ce qu’elle essayait de mettre en place dans un laps de bien trop court pour ce genre d’organisation. Elle prit d’infime précaution, ne joignant personne directement, réactivant de vieille connaissance du temps du Fil à Cuba. Et surtout elle s’arrêta de comploter dès qu’elle fut proche de la frontière de ce pays de non-droit pour les mutants.

*Et bien, ça commence bien ! Quel accueil chaleureux.*
Sa colère et sa méfiance augmentèrent d’un cran lorsqu’elle vit l’escorte à laquelle ils avaient droit.
Sam leur fit quelques recommandations d’usage avant qu’ils n’arrivent. Cela n’était pas si inutile que ça ! Camille se calma un peu craignait plus de déclenché la colère de Sam que l’offensive de l’armée américaine, ce qui la fit sourire.

A terre l’accueil ne fut pas moins… musclé et cerise sur le gâteau, la Confrérie avait été conviée aussi. Camille eut l’impression que l’étau se resserrait, peut-être même était-ce les confréristes qui avaient monté tout ça en s’alliant avec la BCGCDA. Visiblement, ils n’avaient pas l’air beaucoup plus à l’aise qu’eux, ce qui la confirma dans son idée, qu’elle devait à tout prix arrêter d’être aussi paranoïaque, surtout dans des moments comme ceux là ! Toutefois, sa confiance serait on ne peut plus limitée envers les mutants canadien, qu’elle affectionnait certes plus que la horde de soldat et de sniper du comité d’accueil.
Lorsqu’ils étaient descendus de l’avion, Sam avait testé un mode de communication on ne peut plus discret, Camille savait qu’il ne fallait relâcher sa vigilance à aucun moment tant qu’ils auraient un orteil sur le sol américain !

Alors que Maria, la russe qu’elle avait vu à la conférence de presse quelque temps plus tôt, prenait la parole, suivit de Sam avec un ton nettement moins courtois, Camille pouvait sentir la haine de tous ces soldats à leur égard.
*Pourquoi a-t-on accepté de se jeter dans la gueule du loup ?*

Et puis, le groupe de mutants se mit en mouvement et commença à se diriger vers la tente ultra sécurisée – pour qui ? La situation ramena Camille des années en arrière, à l’époque où le Fil avait été créé, essayer de paraître le plus neutre possible pour se fondre dans la masse des anonymes, sauf qu’ici, il n’y avait aucune foule de badauds !
Dans cette situation cela allait donc être plutôt dure et alors qu’ils s’éloignaient de leur appareil respectif, les porteurs du gène X serrèrent les rangs, sûrement pousser par un instinct de survie commun.

*Tout le monde est sur le qui-vive, d’un coté comme de l’autre on dirait.* constata-t-elle.
Mais la mutante avait appris à ne pas se fier aux apparences, d’abord parce que sa curiosité de scientifique la poussait toujours à aller voir plus loin et parce tout ceci ne pouvait être qu’une mise en scène.

Elle ferma les yeux quelques secondes se rappelant l’exaltation du danger, de la poursuite, tout ce qui, lorsqu’elle faisait sortir des gens après l’attaque des écoles "mutantes", lui avait permis de réussir ses missions. Tout cela n’était pas si loin enfin de compte et elle pouvait encore réfléchir suffisamment vite pour trouver une solution de repli si cela devenait nécessaire.

Son regard se posa sur Sam qui marchait devant elle, se replier à son signal si elle ne pouvait plu se servir de télépathie. Sauver sa peau et l’abandonner, c’était bien ce qu’elle avait demandé, Camille savait ce que pensait la télépathe et connaissait les consignes, mais elle savait aussi qu’elle n’abandonnerait jamais quelqu’un. Pour Camille, c’était plutôt, "tous mourir que de d’abandonner quelqu’un derrière" et elle se savait prête à mourir plutôt que de laisser un ou une des leur entre les griffes de ces malades !

Le malheureux soldat John Walker, américain jusqu’au bout des ongles était effectivement un spécimen assez remarquable. Deux balles dans la tête n’améliorent généralement pas l’intellect d’un individu déjà assez limité. En revanche, Johnie boy était un costaud, et ça personne ne pouvait le nier… Cent cinquantes kilos de muscles purs, sans un gramme de stéroïde quelconque, des bras à faire frémir un gorille adulte et une mâchoire utile pour découper des steaks de la taille d’un porte avion… Il n’y avait que les médecins de l’armée qui se demandait ce qui avait permis à ce brave soldat de l’oncle Sam de rester en vie avec quelques grammes de plombs entre les synapses. Mais peu importe. John était un bon soldat, toujours le premier à se jeter au feu, et obéissait aux ordres comme personne.

Pour l’instant, John étreignait son fusil comme la femme qu’il n’avait jamais eut, et considérait Maria et les autres arrivant d’un œil étrange. A croire qu’il paraissait plus intéressé par ses chances de reproduction avec l’une des mutantes présente que par sa mission sacrée de défendre le territoire américain contre ces monstres…

Le général vous attends… Suivez moi… Eclair de lucidité Je vous prie… Retour du patriotisme sacré Sales monstres

Et ce fut donc sous une haie d’honneurs de flingues en tout genre, de divers tanks et braves petits soldats écarquillant les yeux pour mieux apercevoir les terribles mutants que les courageux et meilleurs ennemis furent conduit sous la tente principale. A nouveau, tout bascula dans le cliché le plus complet, à croire que rien n’avait évolué depuis une cinquantaine d’années. Le général était un homme élancé dont les cheveux gris ne dépassaient pas d’un demi millimètres de la coupe réglementaire. Être assis derrière un bureau n’était visiblement pas la passion de cet individu, qui paraissait être le genre d’homme à rester sur le terrain quand bien même ses troupes étaient sur le point d’être submergées. On échappait toutefois au cliché du gros cigare malodorant et bon marché qui garnissait généralement le bec du gradé en chef… En revanche, il ne paraissait pas plus effrayé ou impressionné que s’il se tenait devant une armée d’insecte… Ce que vous étiez probablement à ses yeux Sous la tente, les quelques soldats présents s’affairaient autour de divers moniteurs, tandis que deux troufions à peine majeurs braquaient une paire de lance flamme sur le petit groupes de mutants.

Bien. Vous êtes les mutants ? Appellez moi général. Tout simplement. Vous êtes là pour dénouer une situation de crise. Vous avez vu la télé je suppose ? L’enfoiré qui est passé à l’écran a été localisé. Primo, c’est bien évidemment un de vos semblables. Secundo, il est retranché dans une baraque à quelques kilomètres d’ici. Tertio, il est probable que ses menaces soient réelles. Enfin, il se sait piégé et n’accepte de parler qu’à des mutants. Donc, votre mission, sortir ce fils de dégénéré de sa baraque par n’importe quel moyen, et l’amener où on vous le dira. Promettez lui ce que vous voudrez, du moment qu’on le sort suffisament pour le plaquer ou lui exploser sa sale gueule de mutant… Questions ?

A la place de l’armée de colosses surarmés que Maria avait tant espéré voir descendre du jet anglais, ce ne fut qu’un modeste détachement de quatre personnes qui sortit de l'appareil, trois femmes et un homme. Ce qui amenait l’effectif total des mutants à… sept !
Pas de quoi rouler des mécaniques !
La russe n’avait eu ni le temps ni même l’idée de potasser ses dossiers sur l’Institut avant le départ précipité, aussi ne reconnut-elle que Samarah Lemington… Sa présence parmi eux était néanmoins une bonne nouvelle, elle constituait une alliée de choix en cas de grabuge.
Arrivée à leur niveau, la télépathe en question leur lança une ébauche de salut, Maria lui répondit avec le même enthousiasme chaleureux et jeta un rapide coup d’œil aux trois acolytes qui l'accompagnaient... pour se rendre compte que, de près, leurs visages ne lui évoquaient toujours rien.

Après s’être gratuitement faite traitée de sale monstre, Maria, un sourire acide bloqué aux coins des lèvres, emboita silencieusement le pas au charmant militaire. Pendant le court trajet qui les mena jusqu’à la tente du général, elle réfléchit à la stratégie à adopter en cas de grabuge. Elle avait beau tourner le problème dans tous les sens, si les soldats s’excitaient, le ralliement des frères ennemis deviendrait une nécessité. Autant se jeter à l’eau tout de suite.
***Samarah, pensa-t-elle en regardant où elle mettait les pieds pour éviter que les flaques de boue ne tâchent son costume blanc, apparemment, vous avez mordu au même hameçon que nous. Je n’ai aucune confiance dans les humains en général et dans ceux qui jouent aux petits soldats en particulier. Si jamais ça tourne mal, les deux équipes devront se serrer les coudes. Sommes-nous sur la même longueur d'onde ?***
Elle se permettait de parler aux noms des trois confréristes, sûre que Twik’ et Terry seraient d’accord avec elle. Quand il était question de vie et de mort, les vieilles rancœurs idéologiques passaient au second plan.

Ils entrèrent dans la tente principale. Celui qui se faisait appeler le général se présenta sobrement et leur expliqua avec une concision toute martiale ce qu’il attendait d’eux. Les bras croisés dans le dos, Maria regarda le gradé avec indifférence. Elle se racla la gorge et fit un pas en avant pour indiquer qu’elle prenait la parole :
"_ Général… Commença-t-elle.
Malgré l’envie dévorante d'être une emmerdeuse effrontée, Maria avait renoncé à l'appeler simplement « militaire », comme n'importe quel civil aurait eu le droit de le faire. Ne voulant pas braquer d’entrée de jeu le gradé, elle avait sagement respecté le protocole imposé.
" _ … Je suppose que vous avez en tête que la Confrérie Moderne est un organisme privé. Nous sommes donc ici en tant qu’experts indépendants. La mission que vous nous proposez est assez dangereuse pour que vous n’osiez engager vos propres troupes et ce n’est pas par bonté d'âme ni par amour du danger que nous accepterons de servir de chair à canons…"

Avec une lenteur suffisante pour ne pas perturber les lance-flammes, Maria sortit d’une poche de sa cape blanche une liasse de feuilles imprimées et un stylo.
"_ C'est pourquoi, ajouta-t-elle avec un sourire engageant, avant de commencer, je pense que vous ne verrez aucun problème à signer ce petit contrat. Ses termes sont simples, ils nous garantissent votre non-ingérence dans notre manière de faire, le paiement de nos services et les dédommagements en cas de pertes matérielles et humaines… Une fois ces papiers signés, je repasserai par notre jet pour les faxer à notre siège de Vancouver."

Elle posa le tout sur la table. Au moins, avec ça, si les trois confréristes mouraient aujourd’hui, que ce soit de la main des terroristes ou des militaires, Kenjiss serait assuré de toucher largement de quoi prendre une retraite au soleil jusqu'à la fin des temps !

[Hop ! Post groupé Terry-Sam']

Les représentants de l’Institut rejoignirent les Confrère et après un bref salut d’usage, ils furent bien obligés de suivre la caricature de soldat qui leur servait de guide. Terry s’assura que Twik’ les suivait toujours. Il avait l’impression que la dame en noir n’avait jamais été aussi silencieuse. La peur, peut-être. Mais si elle ne les avait jamais accompagnés de façon officielle, il ne la savait pas moins capable de trancher et d’égorger tout ce qui passait un peu trop près de ses lames.

Paré à toutes éventualités et surtout habitué, le Caméléon ne releva pas l’insulte du soldat. Cela lui aurait fait trop plaisir et il ne souhaitait pas lui offrir ce cadeau. Il se contenta de le saluer d’un bref signe de tête… En se l’imaginant couvert d’une substance gluante bien connue du mutant. Il devait avoir le QI d’une limace, autant lui en donner l’aspect en plus, non ? C’est gratuit. Et totalement indolore. Mais le mutant n’était pas idiot. Leur situation se révélait déjà fort peu envieuse ; il serait suicidaire d’en rajouter une couche.

Maria avait prit la tête de leur groupe et il la laissa faire. De son côté, il surveillait leurs arrières. Tout comme Samarah, dont un rapide coup d’œil lui permit un constat plutôt amer. En cas de fuite, si fuite il devait y avoir, ils n’étaient pas sortis de l’auberge. A cet instant, elle reçut plusieurs messages télépathiques. Ayant légèrement élargi son champ de réception, le message de Maria avait réussi à se frayer un chemin à travers ses neurones au moment où elle recevait celui de Camille. Il y avait donc au moins une bonne nouvelle depuis leur atterrissage. Pour le moment, ils disposaient encore de leurs capacités.

Elle traita donc les messages, tout en avançant sur les pas du soldat. Si elle avait autrefois maudit son don, il lui était aujourd’hui fort utile. Et même si Deklan n’aimait pas avoir son esprit connecté en réseau, il ne pouvait nier le côté pratique de la méthode. La mutante tira ses flèches mentales et elles atteignirent respectivement Camille en même temps que Deklan et ensuite Maria.

*Parce qu’hélas, nous n’avions pas le choix… Pour l’accueil, ce n’est pas vraiment une surprise. C’est ridicule. Ils ont de quoi nous descendre en moins de 5 minutes et ce sont eux les plus effrayés. Restez sur vos gardes. Et j’insiste… en cas de problèmes, vous partez. Je compte sur toi Camille. Deklan, je compte sur tes yeux de lynx et tes petits soldats, mais discrétion totale. N’agis que si tu es absolument sûr de ne pas te faire prendre*

Elle savait que la mutante n’aimait pas l’idée d’abandonner ses amis, mais parfois la situation l’exigeait pour la survie des autres. Elle tourna nonchalamment la tête et capta le regard de Maria, Terry et enfin Twikjeya qui s’était présentée à elle. Une nouvelle empreinte. D’une rare intensité, sombre et froide. Plus froide encore que celle de Kenjiss. Intéressant. Plus l’empreinte était imposante, plus son propriétaire portait un vécu important derrière lui. Elle s’attarda un instant sur l’étrange femme aux yeux bleus. La politesse l’obligea à répondre

*Je suppose que je peux vous répondre la même chose*

Puis, sans plus de préavis, elle fit irruption à la fois dans l’esprit de la Russe et du Caméléon. Elle avait à présent deux réseaux télépathiques ouverts dont elle était le centre de réception. Lorsqu’il sentit l’intrusion mentale dans sa tête, Terry se crispa. Il n’était pas vraiment adepte de telles méthodes, mais il camoufla sa grimace. La situation exigeait certains sacrifices de leur part à tous.

*Parfaitement. Mais cela n’engage que notre survie directe. Pour le reste j’ignore les raisons de notre présence ici, tout comme j’ignore comment vous réagirez face à nos chers hôtes… A ce propos, où est Kenjiss ?*

Car l’absence était trop flagrante pour ne pas la repérer. Et si ses soupçons la tenaillait, elle ne savait toujours pas si Maria et sa clique jouait la comédie ou bien s’ils étaient réellement hors-jeu. Terry, fidèle à lui-même, resta de marbre durant la réception télépathique. Il se contenta de répondre mentalement –tout en se trouvant très stupide-

*Il est resté en arrière*

Ce qui pouvait sous entendre un tas de choses. Il n’en fallut pas plus pour attiser davantage les soupçons de la mutante, mais elle contint sa rage, serrant les dents et ses poignets. Pas le temps de tirer davantage d’informations, ils arrivèrent sous la tente. Elle aurait probablement des comptes à régler avec le tatoué la prochaine fois qu’elle le verrait. Pour ça et tout un tas d’autres choses notamment…

Samarah se glissa à la suite des Confréristes et se plaça légèrement derrière Terry –pour qui cette présence néfaste dans le dos fut parfaitement désagréable. Le type devant eux les toisa et avant même qu’il ne crache ses mots, l’antipathie ambiante avait parlé pour lui. Samarah n’aimait pas ce type. Elle lui en ficherait du général ! Cet abruti de premier ordre ne méritait pas son grade. Déjà, les prémices de sa colère couraient dans ses veines. S’entendre dire qu’ils n’étaient là ni plus ni moins qu’en tant qu’objet ne la calma pas. Mais pour l’instant, elle écouta. Toujours aussi je-fonce-dans-le-tas, la jeune Russe prit les devants et parlait déjà de négociations diverses

*Ridicule* cracha la mentaliste.

Terry ne dit rien mais n’en pensa pas moins. Ils étaient tous à deux doigts de passer au casse-pipe et elle songeait encore à négocier ! Un jour, cette gamine le tuerait par ses frasques. Son enthousiasme pour la Confrérie faisait plaisir à voir. Mais parfois, il fallait pouvoir le mettre de côté. Et parer au plus urgent de façon intelligente. Comme était visiblement en train de le faire Samarah. D’un coup d’œil, il l’observait. La mutante se murait toujours dans le silence mais son esprit tournait à vive allure. Il l’aurait juré. Et il aurait gagné son pari.

Samarah avait encaissé les paroles du ‘général’ sans broncher. Mais à l’intérieur, elle fulminait. Non seulement, ils se servaient d’eux mais en plus, cet enfoiré espérait qu’ils leur livreraient un mutant pour qu’ils fassent ‘mumuse’ avec lui ? Certes, elle n’avait pas apprécié sa déclaration à la télévision mais de là à le condamner à mort entre leurs mains. Ils avaient une affaire à régler, mais entre mutants seulement. Les humains n’avaient pas à s’en mêler. Quand Maria eut fini sa prestation, Samarah s’approcha lentement. Elle n’avait pas encore prit la parole depuis son entrée sous la tente, n’ayant même pas salué le soldat à l’entrée. Son insulte ayant glissé sur une carapace d’indifférence. Elle planta son regard froid dans celui du général et enchaîna

"Vous semblez penser que nous avons déjà accepté cette…mission, général… elle cracha le mot tel le serpent son venin. Pour le moment, nous n’avons accepté que de répondre à votre appel."

Elle s’arrêta un instant pour que l’humain imprègne ses paroles

"Cependant, j’aimerais savoir, dans l’hypothèse où, elle insista sur ces mots, appuyant chacun d’eux, nous refuserions de condamner un frère mutant à une mort certaine entre vos mains, que comptez vous faire ? Nous abattre ? Et prétexter qu’il s’agissait là d’un regrettable incident ? A moins de nous rendre une fois de plus responsables d’une attaque qui n’a même pas encore eu lieu ?"

Samarah se doutait fort bien qu’au final, ils n’auraient pas le choix, mais faire valoir son opinion et ainsi écraser impunément la peur que son adversaire essayait de leur imposer procurait à la mutante un certain avantage. Celui de balayer l’autorité. Comportement dangereux, mais la jeune femme avait toujours défié ce qui lui planait au dessus de la tête, elle n’allait pas changer aujourd’hui. Encore moins pour faire plaisir à un enfoiré de première ! Terry, toujours en retrait, prit conscience à ce moment précis qu’il était entouré de fous. Et comme d’habitude, il devrait compter sur sa diplomatie en cas de dérapage. Il nota cependant dans le groupe adversaire, le seul autre homme de la troupe. Lui aussi paraissait rester en retrait. Un potentiel allié du moment ?

*ces nanas sont folles… complètement barges* pensa-t-il avant de se souvenir, trop tard qu’il était sur écoute.

Un sourire se dessina sur les lèvres de la mutante qui lui répondit avant de poursuivre

*merci du compliment, Terry !*

Le Caméléon se crispa légèrement mais ne lui accorda pas un regard. Leurs ennemis ne devaient pas se douter de leur échange.

"Par ailleurs, je suis étonnée que mon homologue ci-présente n’ait pas relevé ce point capital avant de se jeter sur un tas de formalités administratives. Formalités dont, je vous rassure, j’aurais l’extrême bonté de vous faire grâce de mon côté. L’Institut n’agira que sous la confirmation qu’il n’entrainera inutilement un mutant à la mort. Et pas avant, agir contre notre gré ne fait pas partie de la maison. Oubliez vos ordres et j’oublierai votre notion … plutôt inhabituelle de sécurité."

La mutante jeta un regard sans équivoque sur les côtés de la tente. Là où se trouvait un régiment d’hommes armés et d’autres réjouissances métalliques cracheuses de mort.

"Comme vous l’avez dit, il s’agit d’une affaire mutante. L’agitateur sera remis à sa place… Sans bain de sang supplémentaire"

Il n’était pas question qu’il assiste à un bis-repetita de l’aéroport… Le silence s’installa dans la tente et elle attendit une réaction de la part de ses collègues… ou même de ses collaborateurs de fortune. Le général ne tarderait pas à réagir lui aussi… Lui crachant à la figure qu’ils n’avaient de toute façon pas le choix, que c’était ça où ils ne repartiraient pas. Blablabla. Samarah accepterait alors, histoire de faire bonne figure et aviserait une fois sur place… Lorsque les choses sérieuses commenceraient. Et surtout qu’elle n’aurait plus en face d’elle cette face de rat de militaire

Le trajet jusqu’à la tente se passa dans un calme relatif et dans une atmosphère tendue au possible.
Le réseau télépathique fonctionnait bien pour l’instant, d’ailleurs Sam en avait profité pour rappeler qu’en cas de repli, ils devaient partir sans se retourner. Camille eut un léger sourire, d’abord, parce que Sam la connaissait trop bien et ensuite pour le plaisir de voir les soldats monté en pression… c’est que c’était de petites choses fragiles ces grands gaillards, en fait !

Lorsque le groupe d’alliés mutant pénétra sous la tente, Camille était plus droite qu’un "i", faisait valoir toute son assurance face à des soldats tendus comme des arcs, c’était là, la bonne expression, puisqu’au moindre faux-pas, leur petit groupe finirait probablement en cendres.
Elle n’avait pas pris le temps de vraiment regarder les Confrériste, l’adage qui disait que les ennemis de mes ennemis étaient mes amis étaient on ne peut plus approprié à la situation. Face à cette armée, la Confrérie faisait office d’allié… au détriment de toutes les années de désaccord qui avait précédées.

Lorsque le général prit la parole, le sourire de Camille s’effaça pour ne laisser place qu’à la colère. Comment cet idiot imbu de sa personne osait-il leur donner des ordres ? Elle aurait encore préféré obéir à Kenjiss plutôt qu’à cette vermine.
Ce que faisait subir les Américain – Camille les mettaient presque tous dans le même sac – lorsqu’ils tenaient un mutant, elle en avait entendu des rumeurs lorsqu’elle faisait parti du Fil. Naturellement, ce n’était que des on-dit, presque des légendes urbaines qu’on se raconte pour se faire peur. Mais elle ne doutait pas que dans tout ce qu’on disait il y avait du vrai.
*Franchement, je ne livrerais pas mon pire ennemi à ce chien.*
Elle savait que l’officier ne l’entendrait pas et tant mieux dans un sens, Camille se savait peu diplomate face à de tels hommes et c’est pour cela qu’elle se tenait bien en retrait. Si cela n’avait tenu qu’à elle, ils seraient déjà loin !

S’en suivi la mascarade de la dame en blanc, Camille apprécia, c’était une excellente idée ! Et puis l’intervention de Sam, elle ne doutait pas qu’elle l’ait entendu, d’habitude, la scientifique était d’un naturel plus calme et plus conciliante, mais pas avec la BCGDCA ! D’un autre côté, la télépathe avait raison, ils ne pouvaient laisser ce mutant se faire assassiner par l’armée.

Camille se dit que c’était peut-être une mauvaise idée d’être venue, elle n’aurait jamais que cela ferait autant resurgir le passé.
Et puis, elle se dit qu’on leur cachait forcement quelque chose. Elle avait vu des intervention du Cercle puis de la BCGDCA, naturellement, les protocole et autre stratégie devait changer, mais si elle était certaine d’une chose, c’était qu’il n’hésitait jamais à monter au front !

Elle s’avança doucement, les mains légèrement sur le devant pour bien montrer qu’elle n’avait pas l’intention de faire quoique ce soit. En temps normale elle aurait laisser Sam parler, sans rien ajouter de plus, aurait-elle du penser avant de dire ? C’était trop tard à présent…

"Peut-on savoir ce que vous oubliez sciemment de nous dire ?"
A sa grande surprise, son ton était bien moins agressif qu’elle ne le laissait paraître son regard.
"Si vous aviez pu intervenir, vous l’auriez fait. On est bien d’accord." Il était évident que c’était pure rhétorique et qu’elle n’attendait nullement une réponse de la part du militaire.
" Alors qu’est-ce qui vous empêche d’y aller ? Vous n’avez que faire des pertes humaines, je suis bien placer pour le savoir. De toutes façon, vous les auriez mis sur le dos des mutants et ça vous aurait arranger, non ? Alors, pourquoi faire appel à nous ?"
Camille était cynique en prononçant sa petite tirade sur les pertes humaines. Mais effectivement, lorsqu’elle sortait les mutants d’Amérique, il y avait eu des pertes civiles… des tirs amis comme on aurait dit quelques décennies plus tôt !
Les membres du Fil avaient tous pour consigne de protéger les innocents. Elle n’avait plus peur de tous ces militaire, ni de leur armes. A eux sept, ils les valaient tous et en quelques instant, le rapport de force avait changé, du moins c’était l’impression qu’avait la scientifique.

Le militaire se trouvait dans l’obligation d’accepter leur condition et de répondre à leurs questions… parce que s’ils n’avaient pas donné l’assaut, qu’ils avaient fait appel à eux, c’était que ces hommes ne pouvaient pas lancer l’offensive contre cet homme qui avait pris la parole à la télé… Camille en était à présent certaine.
Enfin, la seconde possibilité qui était qu’ils allaient tous finir en cobayes dans quelques secondes était en seconde position, dans son esprit.

Une magouille... un complot. La pensée travaillait Sinéad. Jusqu'où pouvait aller la BCGDCA pour discréditer la bonne foi des mutants ?

Sinéad demeurait silencieuse. Elle observait de temps à autres Camille, qui semblait préoccupée... et même plus, occupée. Elle s'était emparée du téléphone, parlait bas, passait plusieurs appels. C'était la seule vraiment affairée dans l'avion - Samarah était aux commandes et Deklan, comme elle, attendait leur arrivée. Les deux avions qui vinrent les encadrer à leur entrée aux États-Unis ne la surprit pas : ils auraient affaire aux militaires ; le contraire aurait été étonnant.

Elle écouta passivement - quoiqu'attentivement - les consignes habituelles de Samarah. Elle les connaissait déjà par cœur. Pourtant, elles étaient nécessaires : les rappeler permettait de mieux les intégrer encore.

Plus ils approchaient, plus elle s'inquiétait. Samarah n'avait pas l'air bien, et cette mission ne serait pas une partie de plaisir... pour toute arme, elle avait pris un pistolet électrique. Une arme peu dangereuse, mais très efficace à bien des égards puisqu'elle permettait de changer la force du choc - allant du simple étourdissement à la mort quasi assurée. La mutante avait réglé l'arme au niveau quatre - assomme pour quelques heures. Elle rangea l'arme dans sa ceinture, espérant - espoir qu'elle savait irréalisable - qu'elle n'en aurait pas besoin.

En sortant de l'avion, Sinéad était assez fébrile. Qui ne le serait pas ? L'armée n'avait de toute évidence aucune confiance en eux ; on n'aurait jamais cru qu'ils étaient venus ici pour les aider. Elle remarqua trois autres mutants, plus loin. Dont la porte-parole de la Confrérie. Trois Confrères, donc. Maigre consolation. Avec tout l'attirail réuni ici, s'ils étaient décidés à les tuer, ils le feraient... en un sens, c'était rassurant. Puisqu'ils ne les avaient pas déjà descendus tout à l'heure avec leurs avions, il était probable qu'ils ne le feraient pas du tout. Ou pas pour l'instant...
Peut-être aussi, simplement, que le groupe mutant était plus puissant que prévu et qu'il allait falloir une grande force de frappe pour l'annihiler. Car nul doute que c'était le but visé par la BCGDCA.

Elle ressentit soudain Sam ouvrir son esprit, ainsi que celui des autres. C'était une expérience déstabilisante. Elle avait l'impression - et c'était le cas - que Samarah pourrait tout savoir d'elle si elle le voulait. Elle se sentait vulnérable. Cependant, elle faisait confiance à Samarah et elle savait qu'elle ne faisait ça que parce que c'était nécessaire. C'est possible... répondit-elle à la télépathe. Mais pour l'instant, le loup vise une autre proie...

Elle regarda l'espèce de tank humain qui les accueillit. S'il avait sourit, il aurait certainement été crispé, rigide. Mais il ne souriait pas et, à la place, il promenait un regard lubrique sur les mutantes.

"Sales monstres". Elle se demanda combien de stéroïdes et drogues en tout genre il avait pris dans sa vie. Et même sans ça... Qui est le vrai monstre, celui du corps ou celui du cœur ? ne put-elle s'empêcher de se demander, assez fort pour que Samarah l'entendît.

Avec les autres mutants, elle traversa la "haie d'honneur"... ou de menace ? Quoiqu'il en soit, cela lui permit de reprendre un peu confiance. Ils avaient besoin d'eux. Pour l'instant, ils ne leur feraient rien...

Le général, ou soi-disant, fut à la hauteur de ses attentes en impolitesse et vulgarité. Rien de bien surprenant. Aussi prompte que dans ses débats à la télévision, Maria sauta sur l'occasion et - surprise - ne trouva rien de mieux à demander que de remplir des papiers. Pourtant, il y avait des choses bizarres ici.

D'abord, les deux soldats qui portaient des... lance-flammes ! Dans une tente ? Certes elles étaient résistantes, et cette tente-là était grande, mais une arme aussi peu précise et destructrice ici, ça lui semblait vraiment bizarre.
Il est probable que ses menaces soient réelles, dit-il. Pourtant, il était "coincé" ? Et il semblait dire qu'il était seul, dans une "baraque". Si ses menaces étaient réelles, ce serait un énorme réseau, il n'y aurait pas dû avoir un seul homme...

L'intervention de Maria avait eu au moins un mérite : briser la domination - au moins psychologique - que les militaires leur avaient imposé depuis leur arrivée. Peut-être que cette armada et ces soldats n'avaient d'autre but que de nous intimider et nous obliger à conclure sans réfléchir à leurs accords... pensa-t-elle, en partie pour elle, mais aussi pour partager cette hypothèse avec Samarah, une fois qu'elle avait terminé de parler. Le dédain qu'elle avait affiché pour la "paperasse" ne l'étonna pas. C'était, Sinéad suspectait, une des raisons qui avait fait qu'elle avait refusé de diriger l'Institut.

Ce fut Camille qui prit la parole et fit part de ses doutes ouvertement : c'était une bonne chose. Si ce général était sincère, il leur expliquerait. Dans le cas contraire... au mieux, il serait pris au dépourvu - au pire, il leur mentirait et ils le croiraient.

Sinéad avait aussi ses propres doutes, et elle n'attendit pas que le général répondît à Camille pour parler à son tour :

- Général, commença-t-elle en feignant un respect, quoiqu'il était évident pour tous que ce n'était pas le cas, j'avoue être troublée moi aussi.

Elle prit un certain plaisir à lui répondre, alors qu'il était si vulgaire, d'une manière bien plus digne - c'était une façon de souligner la différence entre eux. Elle inspira, s'efforçant à un certain calme et une assurance qui grandissaient au fur et à mesure qu'elle parlait.

- Est-ce qu'il est seul ? Car c'est ce que j'ai cru comprendre, pourtant, vous avez dit que ses menaces étaient sans doute réelles. Si c'est le cas, est-ce que nous n'aurons pas affaire à un groupe entier ? Pourquoi serait-il seul ? Pourquoi, s'il est piégé, les autres ne ripostent pas ? Et est-ce qu'ils ne le feront pas encore plus certainement si nous arrivons à faire sortir ce fils de dégénéré et que vous lui explosez sa sale gueule de mutant ?

Là. Elle avait dit ces derniers mots sur le même ton que tous les autres, comme s'ils ne détonnaient pas avec tous les autres. Elle finit sur un ton modéré, presque d'excuse, si son sourire poli n'avait pas été un tout petit peu exagéré - oh, trois fois rien, juste ce qu'il fallait pour que quelqu'un qui présentait un tant soit peu une lueur d'intelligence comprît que ce sourire était tout à fait faux :

- Non pas que nous doutons que vous alliez répondre à toutes ces questions en nous informant plus avant de la situation, mais puisque vous nous avez demandé si nous avions des questions, eh bien, j'en ai profité pour apporter tout de suite le sujet.

En cet instant, Sinéad était sûre que si elle avait été sous son commandement dans l'armée, elle aurait eu une belle correction - quoique, en apparence au moins, et suffisamment, elle avait été tout à fait correcte, il y avait toujours eu dans son attitude quelque chose qui indiquait qu'elle méprisait le général. Cela dit, elle n'était pas sous son commandement - et elle avait rendu ça clair. Elle s'imagina un instant sous le commandement de ce général, dans l'armée... quelle horreur. C'était à cause de telles personnes que la situation stagnait aux États-Unis. A cause de personnes incapables de comprendre que les mutants étaient des êtres humains eux aussi.
Nous jouons cartes sur table... mais finalement, nous avons un bon jeu.

Le général ne fit qu'incliner sa tête grisonnante, visiblement très attentif à vos paroles. Beaucoup auraient éclaté de rire avant d'ordonner la mise à mort des mutants, mais votre interlocuteur ne manifesta pas la moindre émotion face à la demie douzaine de mutant relativement remonté qui lui faisaient face. Et ce fut avec un détachement presque palpable qu'il attendit que chacun se taise avant de répliquer posément, lentement.

Mademoiselle Yevgeniyen Il avait visiblement révisé ses fiches avant de vous adresser la parole, et avec la prononciation correcte s'il vous plait ! Plus impressionnant encore, le gradé faisait visiblement des pieds et des mains pour garder son calme face à une demande... étrange. Je n'ai pas l'intention de signer le moindre document vous donnant droit à des rémunérations quelconques. Vous êtes ici parce que vous le voulez bien, et nous ne vous retenons en aucun cas. Certains semblent considérer que répondre à notre demande leur donne le droit d'exiger des promesses de notre part... Regard coulé à l'attention de la meneuse de l'Institut. La balle dans la tête n'est qu'une éventualité à laquelle nous nous préparons mademoiselle Lemington. La capture de ce terroriste est préférable. Sachez simplement que votre... frère, a déjà déchiqueté un gamin de dix neuf ans dont la seule erreur aura été de s'engager dans l'armée. J'espère qu'à l'avenir, vous éviterez la familiarité avec ce genre d'individus... Si vous refusez, nous vous renvoyons dans vos jets, hurlons au scandale, les gentils mutants refusent d'aider à la réconciliation entre nos deux races, et par dessus le marché, nous rasons la baraque de votre frère adoré au canon de campagne.

En revanche, Camille écopa d'un regard étincelant de la part d'un général particulièrement remonté. Et ce fut une voix aussi affûtée qu'une lame de rasoir qui répliqua à la jeune femme, tandis qu'un regard méprisant semblait broyer la mutante.

Contrairement à ce que vous semblez croire mademoiselle, nous ne sommes pas des fous sanguinaires. Veuillez lever la tête de vos tracts anarcho de bas étages appelant à la révolte contre les monstres humains et acceptez de nous considérer comme des êtres vivants éprouvant des sentiments. Je suis un soldat, ce qui ne signifie pas pour autant que j'envoie mes hommes faire des piles de cadavres pour un putain de mutant. Figurez vous que j'apprécierais de renvoyer mes gosses chez leurs parents au lieu d'écrire une dizaine de certificats de décès "Votre fils est mort en pissant dans son caleçon parce que la grande Mayfield a décrété que nous étions des salauds sans cœurs et qu'il valait mieux envoyer votre gosse et ses copains s'en prendre plein la gueule à sa place, elle qui avait une chance de survie.".

Sinead enfin, eut droit à un général irrité, mais faisant visiblement des efforts surhumains pour ne pas l'insulter à la suite de son amie. Étonnamment, mister général ne tenta pas de relever l'ironie largement palpable dans les propos de la mutante. L'homme porta toutefois la main à son oreillette vers le milieu de sa tirade.

D'après nos dernières études, il y aurait trois êtres vivants dans cette cabane. Je n'en sais pas plus que vous. L'équipe classique que nous avons envoyé n'est pas ressortie, à l'exception du bras lacéré d'un des dix hommes, qui portait pourtant une armure complète. Ils communiquent par téléphone, lequel est dans le camps avancé, entourant la bâtisse. Pour l'instant, ils n'ont accepté que de parler à des mutants, nous promettant de ne pas sortir avant que leurs exigences soient satisfaites. S'ils pointent le bout de leurs nez hors de la cabane, nous les éradiquons, tant pis pour l'interrogatoire... Nous ne voulons pas courir le moindre risque. Oh... Monsieur Fanel ? Je vous serais reconnaissant d'arrêter vos activités sismiques ou quoi que ce soit allant dans ce sens, nos contrôleurs deviennent nerveux...

Nous n'avons pas d'informations plus récentes. Ils sont enfermés dans une cabane en bois, refusent d'en sortir, promettent de faire péter leurs bombes si nous n'amenons pas des mutants pour leur parler... A rien y comprendre. Nous brouillons leurs communications longues portées, qu'espèrent ils ? Je vais finir par croire qu'ils veulent mourir en martyrs... Peu importe. Vous prenez cette mission ? D'après certains de nos contacts politiques, cela pourrait vous servir d'un point de vue diplomatique... Si vous revenez, certes.

Face aux remarques désobligeantes des quatre femmes, la patience relative dont avait fait preuve le général était une bonne surprise. Il les avait toutes écoutées sans sourciller et avait réussi à leur répondre en gardant un semblant de sang froid. Ses paroles avaient certes été froides, cassantes et ironiques, mais juste pour cela (et aussi, notons-le pour son excellente prononciation du nom de famille de la porte-parole) peut-être méritait-il vraiment son grade de général.
Maria reprit ses documents et les rangea bien sagement dans sa cape, les lèvres pincées.
"_ Vos méthodes avoisinent le délit de grivèlerie, général, fit-elle sur un ton calme et posé en faisant disparaître ses bras dans sa cape, votre logique est celle d’un client de restaurant refusant de payer l’addition en prétextant le fait que le serveur serait venu jusqu'à lui de lui-même, sans jamais préciser que le repas ne serait pas gratuit."

Mais comment Kenjiss était-il arrivé à la conclusion que répondre à cet appel du BCGDCA serait profitable à la Confrérie Moderne ? Quelles raisons obscures avaient eu le pouvoir de lui faire accepter cette arnaque évidente ? Maria n’en avait pas la moindre idée mais le boss avait maintes fois prouvé de par le passé qu'il méritait qu'on lui fasse confiance !
"_ Malgré tout, poursuivit-elle avec un sourire en reculant d’un pas, maintenant que nous sommes arrivés jusqu'ici, nous allons faire preuve de bonne volonté et intercepter à votre place ce superior… Ainsi, vous vous rendrez compte de la terrible erreur stratégique que vous avez commise, général : la Confrérie Moderne se souviendra de cette entourloupe ! Croyez-moi, nous ne prendrons plus la peine de décrocher le téléphone la prochaine fois que vous serez en difficulté ! … Et je tiens à vous rappeler que la manipulation des médias peut se faire dans les deux sens !"

A ces mots, elle se retourna et commença à se diriger vers l’extérieur. Maintenant que le général ne pouvait plus le voir, le sourire sur son visage s’évapora pour laisser place à un air sombre et fermé. Elle croisa les regards de Twik’ et Terry :
"_ Je sors. Vous venez ? Il n’y a plus rien à faire ici… Montrons à ces militaires notre efficacité sur le terrain, histoire qu’ils regrettent de ne plus pouvoir faire appel à nous à l’avenir !"

Bien évidemment, ce n’était que de vaines fanfaronnades, elle savait que la puissance d’attaque des trois confréristes réunis n’était pas épatante –s’ils avaient eu Kenjiss ou Kyle, à la rigueur- mais maintenant, ils pouvaient sortir la tête haute de la tente.
Maria traversa le groupe de l’Institut. En passant à côté de Samarah, elle lui chuchota télépathiquement :
*** Si jamais vous possédez un potentiel de destruction suffisant pour botter les fesses de ces con-----, n’hésitez pas ! Nous serons ravi d’être à vos côtés.***

Juste pour en rajouter un peu à cette sortie théâtral, elle pressa un bouton au niveau de la saignée de son bras et colora automatiquement son costume en noir, marquant ainsi l'arrêt définitif de son rôle de porte-parole.

Arrivée dehors, Maria vit le digne représentant de la race inferior -le militaire idiot qui les avait guidés jusqu’à la tente- patienter au volant d’une jeep. Elle n’approcha pas davantage et attendit que ses compagnons la rejoignent.

(Again, post groupé Sam/Terry)

Samarah n’était pas la seule à devoir faire un effort pour se contrôler. A ses côtés, elle sentait Camille prête à bondir sur leur hôte pour lui arracher les yeux. Heureusement qu’elle était capable de garder son sang froid. En général. Deklan lui confirma dans la foulée avoir exploré le terrain. Juste au cas où…

*Bien… s’ils s’en aperçoivent, retire tes marques. On ne prend aucun risque. Comme tu le vois, ils n’hésiteront pas à tirer, ils ont déjà mis le paquet*

Puis elle continua à l’attention de Sinead et des autres

*Restez prudents, le chasseur peut braquer plusieurs loups à la fois…*

Si le reste de ses connectés demeuraient silencieux, Sinead pour sa part continuait de penser. La jeune femme captait ses interrogations et elle était hélas bien incapable de lui répondre

*Va savoir… chacun renferme une part de monstruosité, qu’elle soit de corps ou de cœur m’importe peu pour le moment, pas avec ces enragés tout autour de nous. C’est peut-être une manœuvre d’intimidation, oui. Et nos cartes ne sont pas si bonnes. Un mouvement de travers et nous sommes morts. Ils sont partout…Mais que cela ne nous empêche pas de leur montrer qu’il en faut plus pour nous effrayer…*

Concentrée sur leur situation, Samarah ne captait que les pensées directes de ses congénères. Elle ne se préoccupait pas de leurs pensées profondes. Aussi, le fait que Twik’ n’hésiterait pas la découper en rondelles resta enfoui dans l’esprit de la sombre dame. Même si cela ne l’aurait pas étonnée de le découvrir.

Néanmoins, un détail dans son attitude attira son attention lorsque le général reprit la parole. Il paraissait calme. Trop calme pour un gars entouré de mutants malgré la puissance de feu dont il disposait. Le regard sombre de la mutante se fit soudain plus inquisiteur. Une idée jaillit. Et si… ? Tandis qu’il parlait, la mutante décida de vérifier sa théorie. Pour cela, elle possédait une méthode radicale. Elle sonda rapidement la tente. Elle eut sa réponse. Il lui manquait une empreinte mentale. Bingo. Un sourire féroce naquit sur ses lèvres tandis qu’il renvoya la demande de Maria aux oubliettes.

"Vous êtes habile, général. Mais vous auriez au moins pu avoir le courage de nous honorer de votre présence physique… Quant à ce gamin, s’il s’était engagé dans l’armée, il a effectivement commis une erreur. L’égarement de la jeunesse sans doute…"

Samarah ne se laissait pas démonter si facilement. Et puis, elle détestait l’armée sous toutes ses formes.

"Nous sommes donc contraints de collaborer. Pour la bonne entente diplomatique et purement fictive de nos dirigeants respectifs, son ton teinté d’une ironie à peine dissimulée, par contre, revoyez vos paroles. Elles vont dans les deux sens. Vous semblez oublier que les mutants aussi aspirent à une vie normale"

C’était exactement ce genre de comportement qui mettait les nerfs de la mutante à haute épreuve. Que les humains se prennent en victimes constantes sans se douter des attentes de l’autre côté de la barrière. Ils n’étaient pas seuls, ces sales égoïstes ! Il y avait aussi des mères qui souhaitaient voir leurs gosses rentrer à la maison le soir ! Elle contint sa rage. Elle pourrait servir, mais plus tard. Pas question de leur donner la moindre démonstration d’un quelconque dérapage. Pas question de leur apporter sur un plateau ce qu’ils attendaient. Ils détectèrent l’exploration sous terraine de Deklan. Tanpis. La mutante eut au moins la confirmation qu’ils les surveillaient de toute part. Ce serait folie de tenter quelque chose ici et maintenant

"Mr Fanel n’a fait qu’exécuter mes ordres, général. Par simple mesure de précaution. Je me doute que vous comprendrez, en tant que militaire"

Si la mutante ne se déparait pas de son ton acide, franchement désagréable, elle jugea bon de calmer le jeu. Elle lança un message général

*On arrête les provocations. Nous avons les informations qu’ils nous faut, maintenant qu’on est sur place, mettons un terme à cette histoire plus que douteuse. On avisera le reste plus tard*

Maria transmit le message de la télépathe au général en acceptant de coopérer. Elle ajouta néanmoins

"Le Nouvel Institut prêtera main forte à la Confrérie Moderne dans cette opération, à choisir la mutante préférait encore collaborer officiellement avec la Confrérie que de prêter main forte à l’armée américaine. Le général était aimablement prévenu. Mais il se souviendra aussi de vos méthodes à sens uniques"

La mutante tourna alors le dos à l’hologramme qui leur avait tenu tête durant la réunion, ses équipiers sur les talons. Parmi eux, se trouvait un caméléon bien silencieux. Il n’avait absolument rien dit, préférant laisser Maria agir. A défaut de parler, il avait observé les réactions diverses. Lorsqu’il sortit à son tour de la tente, il assista à une métamorphose étonnante –qui pour une fois n’avait rien à voir avec ses écailles !-, la porte parole angélique avait fait place à Maria, la machine de guerre impitoyable.

"Je suis d’accord, Maria. Mais restons prudents quand même. Tout ça n’est pas clair. Au plus nous avançons… ça n’a vraiment pas de sens. Si c’est un piège, il se referme. Qui nous dit qu’il y a réellement un groupe de mutants là-bas ? Ils ont peut-être trouvé une solution pour amputer la Confrérie et l’Institut d’une part importante de leurs effectifs"

L’homme caméléon voyait sans doute trop loin, mais on n’était jamais trop prudent. Il fallait être le dernier des crétins pour ne pas s’apercevoir que la majorité de la puissance d’attaque, tout camp confondu, était présente dans ce désert. Sans doute vulnérable et donc facile à écraser. Mais Maria ne semblait pas l’entendre de cette oreille lorsqu’elle demanda à Samarah d’intervenir. Cette dernière sourit vaguement

*Je pourrais effectivement m’amuser un peu, mais vous comme moi risquerions d’y rester. Ce que, ni vous ni moi ne désirons pour le moment, j’en suis certaine*

Elle n’avait jamais libéré son potentiel à fond- ce dont elle aurait probablement besoin si elle voulait nettoyer la zone- et elle jugea bon, pour leur survie immédiate, de ne pas le faire. Tant par crainte de voir ‘le régiment d’accueil’ révéler leur véritable utilité, que d’y rester définitivement à dépenser toute son énergie vitale. Or, Samarah n’avait pas prévu de mourir aujourd’hui. La mutante se contenta donc d’avancer vers ‘gueule d’abruti’ qui les attendait dehors dans une jeep. D’un mouvement de tête, elle fit signe à ses compagnons de monter à bord. Et ceux-ci s’exécutèrent.

Tout comme elle, Sinéad avait fait par de ses interrogations, c’était légitimes après cette convocation, non ?

La réponse du Général déplut fortement à Camille, mais il fallait s’y attendre, le militaire n’était certainement pas là pour rendre leur voyage agréable, ni convivial. Il avait sans doute été choisi pour son sang froid en effet, il refusait tout en bloc et continuait à exiger plus qu’il ne demandait. C’était comme s’il n’avait que faire de se mettre les Confréristes à dos…

Camille gardait ses mains dans son dos, non pas qu’elle aurait pu utiliser accidentellement son pouvoir, il n’y avait de toute façon pas d’eau. C’était plutôt pour ne pas que le Général ait la satisfaction de voir que ses poings s’étaient serrés à sa réponse – même si dans l’absolu, elle se doutait que le militaire pouvait certainement voir la tente sous toutes les coutures.

"Vous êtes habile, général. Mais vous auriez au moins pu avoir le courage de nous honorer de votre présence physique…"
A la remarque de Sam elle comprit pourquoi le militaire avait autant d’assurance, c’était tout de même un comble, qu’il l’accuse, elle, de tueuse d’enfant alors que lui n’avait pas le cran d’être sur le terrain avec ses hommes !
"Quant à ce gamin, s’il s’était engagé dans l’armée, il a effectivement commis une erreur. L’égarement de la jeunesse sans doute…"
"Sans compter que ce n’est pas nous qui avons mis une arme dans ses mains, pas plus que nous ne l’avons envoyé au combat !"
Elle n’avait pas pu s’empêcher d’ajouter ces paroles, son ton était sarcastique au possible, mais elle avait murmuré, bien qu’elle soit certaine que ses quelques mots avaient été entendus par le principal intéressé.

Finalement, ils sortirent – enfin – de la tente, suivant Sam, tout comme Sin qui passa devant elle, Camille n’eut pas un regard en arrière pour ceux qui sortaient derrière.
Dehors, les seuls changements furent la couleur de la tenue de la porte-parole et la jeep qui les attendait. La scientifique avait l’impression que le reste des soldats étaient comme figés. Le chemin qu’ils avaient emprunté de leurs jets à la tente était encore là et de chaque côté les soldats, le regard droit, attendant leurs ordres. Cela rappela à la mutante combien elle détestait l’armée et encore plus ici, dans ce pays. Ailleurs, elle jouait la carte de la diplomatie, mai là, il n’y avait que peur et bêtise qui émanaient de ces hommes.

Ce qui pouvait paraître paradoxale c’était le fait que Camille avait sur les lèvres un sourire. Il n’était ni amusé ni moqueur, il était là pour bien signifier que quelque soit le piège, ils pourraient de toutes façons s’en sortir, elle n’en doutait pas une seule minute !

Son regard se posa sur la jeune femme de la Confrérie Moderne qu’elle n’avait jamais vu. Elle avait gardé un silence de mort durant tout le temps qu’ils avaient été sous la tente, aussi Camille se demanda ce qu’elle avait à cacher. Elle ne paraissait pas timide, juste discrète, ce qui, finalement, devait cacher un pouvoir pas si mal que ça, non ?
Elle secoua la tête comme pour se signifier à elle-même que son raisonnement était absurde. Même si elle n’avait vraiment aucun don pour deviner les pouvoirs des autres mutants, elle penchait pour un pouvoir mental dans le cas de la demoiselle. Après tout sur quoi était-elle restée si concentrée durant la discussion si ce n’était un esprit quelconque à explorer ?

Une fois arrivée devant le véhicule tout terrain, elle laissa d’autres s’installer, qu’importe, on n’était plus à l’école où les premiers prenaient les meilleures places au fond et les derniers s’installaient à côté des enseignants.

Elle s’installa à son tour, à l’arrière, comme tout le monde, visiblement, on préférait se serrer un peu plutôt que devoir être à côté du sous-fifre !
Camille sortit son PAD et le mis en mode GPS, comme elle s’y attendait, les américains ne leur donnaient pas accès à leur satellite… Heureusement prévoyante, Camille avait chargé un relevé topographique de la zone avant de partir, plus tard, elle n’aurait plus qu’à prendre trois points de repère et elle pourrait savoir la direction qu’ils prenaient.
Elle montra l’écran à Deklan, pour bien lui signifier qu’elle avait également pensé à charger le type de sol… elle ne savait pas si cela pouvait aider le mutant ou pas, mais on ne savait jamais, surtout avec les américains !

Twikjeya avait suivi la conversation sans intervenir, se contentant d’enregistrer les informations qu’elle analysait malgré leur manque de profondeur… Elle nota sans la moindre émotion que le général était bel et bien un hologramme. Logique. Les gradés se risquaient rarement sur le terrain ainsi, encore moins dans une tente ne servant qu’à l’acceuil des invités –et non pas aux opérations à proprement parler-. C’était en outre un excellent moyen de tester les mutants, de voir s’ils étaient réellement prêts à l’emploi sans risquer de pertes trop importantes… Et la sombre mutante savait parfaitement qu’ils étaient passés très près d’un échec retentissant.

La jeune slave était ensuite montée dans la jeep d’un pas élégant, dégageant de justesse sa jupe pour ne pas se retrouver coincée dans la portière et s’était assise sur le siège (modèle A5 de base, plastique sur châssis de métal, requiem for your fessier) sans la moindre grimace d’inconfort. Twikjeya était toutefois bien en deça des normes militaires et paraissait presque flotter dans le siège prévu pour des types trois fois plus lourd portant quelques kilos de matos, et ce n’était pas la demie douzaine de pièces de métal qui déchiraient soigneusement sa chair qui allaient l’incommoder…

Les deux jeeps démarrèrent avec leur curieuse cargaison. Les soldats les regardèrent passer avec une pensée émue pour le conducteur, désormais seul au milieu des monstres sanguinaires… Lesquels étaient tout de même traqués par quelques drones en haute altitude, lesquels portaient chacun un missile capable de raser une centaine de mètres carrés… On n’arrêtait pas le progrès.

Le trajet fut franchement monotone. Mis à part quelques pins typiquement nord américains et un écureuil qui traversa la route poussiéreuse à souhait, aucun des conducteurs n’ouvrit la bouche, mâchoires visiblement serrées…

Miss Lemington ?

Étonnamment, ce fut Twikjeya qui rompit le silence. Certains entendirent peut être sa voix pour la première fois, et purent apprécier la douce mélopée de ses mots… La jeune slave s’était retournée sur son siège pour regarder la directrice de l’Institut dans les yeux, dégageant une oreillette de .. hé bien de son oreille. Ou plutôt du pauvre petit bout de chair généralement martyrisé, et qui pleurait presque de joie de ne pas crouler sous des boucles d’un demi kilo.

Quelqu’un veut vous parler.

Les longs doigts d’acier s’écartèrent pour donner l’oreillette à Lemington, laquelle passa à dix centimètre d’une lame gainée dans l’avant bras de la slave… La sombre dame se retourna aussitôt que son oreillette eut quitté sa main, et se remit à scruter la route. Samarah put elle entendre une voix particulièrement détestée résonner dans son oreillette, en même temps que dans toutes celles des confrères.

Sam’ ? Ici Kenjiss ! Ca fait longtemps hein ? Plus sérieusement, je viens de déposer ta marque de tisane préférée sur ton bureau. Ou ce que je suppose être ta préférée, nos espions ont un peu manqué leur coup question repérage… Oui je suis à l’Institut. Non il n’y a pas eut de morts, pas plus que de blessés. Il y a juste quelques élèves qui bavent en frappant contre ta porte, visiblement énervés à l’idée que je squatte ta chambre…

Lemington. La voix parut immédiatement plus menaçante. La prochaine fois que tu t’en prends à un des miens ou à la Confrérie, ce n’est pas une boite de tisane que je laisserais ici. C’était un simple avertissement, un souvenir du British. N’essaye jamais de t’en prendre à moi ou à un de mes élèves, pas plus qu’aux responsables de la Confrérie. Reste dans ton coin et tout ira bien. J’insiste sur le simple avertissement. Ce n'est pas une déclaration de guerre. Mais si tu réduit Emmett à l’état de légume pour te venger de mon intrusion, je fais péter ta baraque avec tous tes élèves dedans. Tu va sans doute hurler ta colère en me traitant de lâche mais n’oublie jamais que nous menons une guerre tandis que vous ne faites que jouer. Bonne mission. Ah et rends l’oreillette à ma pauvre Twik veux-tu ?


La voix du tatoué s’éteignit dans un cafouillis de parasites… En même temps qu’une image s’affichait en trois dimension devant les yeux de la maitresse de l’Institut, en l’occurrence son bureau avec la fameuse boite de tisane. Une preuve sans doute…

Les jeeps s’arrêtèrent brutalement au sommet d’une petite colline… En contrebas, à trois cents mètres environs se dressait un petit chalet de bois, visiblement au fond d’une cuvette surmontée d’arbres. Aucun soldat n’était visible, mais il était évident que vous touchiez au but, à moins que les gros tas qui vous servaient de conducteurs se soient complètement plantés… L’un d’eux prit d’ailleurs la parole.

C’est ici. Dans la baraque. Nos forces sont placées tout autour de la cuvette, camouflées. ils sont piégés. A vous de jouer maintenant, vous n’avez aucun ordre supplémentaire mis à part ceux que le général vous a donné. Allez y comme vous voulez. Vous serez à découvert le temps d’accéder à la cabane. Pour obtenir de l’aide de nos forces, tirs de couverture ou quoi que ce soit, fréquence trois. Il y aura toujours quelqu’un à l’écoute.

Les dernières études thermiques montrent trois personnes dans la baraque. Elles sont fiables à 60%.

Et lourdaud number ouane de se taire tandis que les mutants débarquaient… Livrés à eux même.

Twikjeya se recoiffa soigneusement, sans quitter la maisonnette des yeux. La jeune slave s’empressa de vérifier que ses lames coulissaient parfaitement avant d’assurer la sangle de sa sacoche de secours… La brise soufflait toujours, agréablement fraiche…

"_ Ça sent effectivement le piège à plein nez, chuchota Maria en réponse à Terry, mais nous serons rapidement fixés. S’il n’y a pas de mutant là-bas, Lemington s’en rendra compte très vite. Pour le reste, on procédera pas à pas, je compte sur ton camouflage caméléon et les lames de Twikjeya pour nous couvrir."

Sur ses mots, Maria grimpa dans la jeep et se retrouva assise aux côtés du mutant qui s’était fait remarquer sous la tente par ses « activités sismiques ». Elle lui accorda un petit hochement de tête en guise de salut poli.
La jeep démarra en trombe et s’engagea sur une piste rocailleuse et défoncée, idéale pour tester l’efficacité des amortisseurs. Les mains croisées entre les cuisses, Maria restait silencieuse, l’air morose et les yeux dans le vague. Elle fixait la poussière de la piste sans la voir. Tous ses neurones travaillaient à résoudre au mieux le casse-tête de cette mission-suicide. Elle en tira la conclusion que s'ils voulaient avoir une chance de s'en sortir entiers, ils allaient devoir biaiser et brouiller les cartes.

Dans son oreillette, la douce voix du boss se fit entendre et la tira de sa torpeur. Il voulait parler à Samarah. Maria écouta attentivement le message, les yeux toujours fixés sur la route et laissa juste un petit sourire satisfait poindre sur ses lèvres.
Elle ne chercha pas à narguer davantage la colonisée, ce serait inutile et anti-productif pour la mission.
***Samarah ? Pensa-t-elle sans sourciller, sans quitter la route des yeux, j'imagine que cette mauvaise nouvelle vous a chamboulée. Je n’aimerais pas que le stress vous fasse faire des bêtises ou prendre de mauvaises décisions quant à cette mission. Je désirerais vous exposer la tactique d'approche que je viens de bâtir.
Pour commencer, serait-il possible que vous établissiez un lien psychique temporaire entre nous tous ? Nous avons des choses à mettre en place ensemble qui ne doivent pas être entendues par les oreilles ennemies.***

Les oreilles ennemies, c'était bien entendu celles qui pendaient autour de la cacahuète cérébrale des porte-flingues de l'armée. Maria attendit quelques secondes et se lança.
***Si j’ai bien compris les ordres du général, pensa-t-elle en espérant que les autres étaient déjà connectés, notre mission consiste à faire sortir les mutants de leur tanière pour permettre aux snipers de leur creuser un troisième trou dans le nez. Je pense que vous êtes d'accord avec moi pour dire que ce n’est guère acceptable. Nous devons nous arranger pour leurrer ces dingues et ramener les mutants vivants jusque chez nous sans qu'ils ne s'en rendent compte.***

La jeep s’arrêta, ils étaient arrivés à destination. Un des conducteurs donna les dernières instructions, Maria descendit et s’épousseta la cape très consciencieusement. Bien que toujours muette, son cerveau ne perdait pas de sa verve. Elle exposa sa stratégie aux sept mutants.
*** Je vais vous proposer un plan d’escamotage. Il est très tiré par les cheveux et si vous en avez un meilleur, n’hésitez pas !***

Sans attendre de réponses, elle enchaîna :
***Bon. Leur technologie thermique ne semble pas fiable, c'est un bon point pour nous, ça va nous aider. Ce que j’aimerais savoir, c’est s’il y a parmi vous des mutants capables de sortir de la cabane sans être vus.
Le principe serait que, de leurs positions, les soldats voient quatre d’entre nous entrer pour en ressortir complètement bredouilles vingt secondes plus tard. Si, de loin, ils voient les mêmes costumes avant et après, ça passera. Surtout si on parvient à brouiller leur vision avec un petit nuage de poussière ou de fumée.
Terry, par exemple, penses-tu qu’il te serait possible de céder ta place et tes vêtements et sortir discrètement par une fenêtre ouverte en utilisant ton camouflage caméléon ?
Samarah, seriez-vous capable grâce à vos pouvoirs télépathiques de camoufler votre présence ou celle d’un terroriste ? Voire même de deux ?
Et les autres ? Avez-vous des pouvoirs qui vous permettraient ce genre d'exploits à la Houdini ?***

Elle laissa aux six mutants le temps de réfléchir à leur potentiel.
***A l’intérieur de la cabane, comme nous ne disposerons que de quelques secondes pour l’échange de vêtements, il serait judicieux que Samarah briefe télépathiquement nos amis de cette manœuvre et voie s’ils sont d’accord. Sachant que c’est peut-être leur seule chance de survie.

Ensuite, une fois tout le monde sorti, ceux d’entre nous qui auront cédé leur place aux terroristes s’éloigneront discrètement de la cabane et attendront qu’on vienne les récupérer plus tard quand le danger sera écarté. Nous expliquerons aux soldats que, visiblement, les terroristes se sont échappés dans la nature et ce seront sept mutants qui réembarqueront dans les jeeps jusqu’aux jets. Avec un soutien télépathique pour maintenir l’illusion, ça peut être jouable !***

Les yeux toujours rivés sur la cabane, Maria s’étirait les bras en baillant. Elle tournait le dos à ses coéquipiers et rien dans son attitude ne laissait entrevoir qu’elle communiquait avec les autres. Elle commença à faire des mouvements d'assouplissement.
***Alors ? Qu'en pensez-vous ? On tente le coup ou quelqu’un a une autre idée à proposer ?***

De toute façon, ce genre de plan avait le défaut de s'écrouler à la première anicroche et devait toujours être remanié dans le feu de l'action... Mais cela avait l'avantage de donner une première série d'objectifs clairs à remplir.

Lorsque Twik’ lui tendit l’oreillette, Samarah devina rapidement qui se trouverait à l’autre bout. Le seul en vérité qui répondait aux abonnés absents ici même, dans cette jeep inconfortable à souhait ! Elle fronça les sourcils, l’arnaque se précisait petit à petit.

"Kenjiss…, à peine un murmure, quasi inaudible entre ses dents serrées, quelle surprise… Je me demandais quand tu te manifesterais enfin dans cette histoire."

Si jusque là, la mutante n’était pas surprise d’entendre la voix de son cher adversaire, la suite des évènements prit une toute autre tournure. Honnêtement… son orgueil en prit un coup et son mépris habituel vacilla, le temps d’un battement de paupière. Puis, le corps de la mutante se raidit tout aussi vite tandis que son regard s’assombrit pour se faire dur et menaçant. Elle s’était attendue à beaucoup de choses, mais… elle fut obligée de le reconnaître, son ennemi avait frappé fort. Très fort. Pour en arriver à détourner les défenses de l’Institut et oser pénétrer chez elle. Samarah eut le temps de se jurer de passer au crible tout l’Institut pour dénicher lesdits espions avant que sa colère n’explose.

Heureusement, celle-ci fut contenue dans ses paroles et tous, aux alentours de la mutante purent s’estimer heureux de se trouver toujours en vie. Sa voix soudain glaciale, mais pourtant étrangement calme face à la situation et peu familière, aurait du alerter ses compagnons. Au moins un en particulier. Seulement, la petite troupe n’avait pas entendu le message et ne se douta pas de l’impact que celui-ci put avoir sur la mutante. Ses compagnons ne remarquèrent rien ou presque, trop occupés à observer et se préparer au danger, au piège qui se refermerait probablement bientôt sur eux.

"C’est très aimable à toi, vraiment de te préoccuper de ma santé, mais c’est inutile... surtout pour quelqu'un qui veut m'enterrer !"

Son ton faussement agréable se fit rapidement plus cassant, tout comme le mutant. Menace pour menace…

"Si tu touches à un seul de mes élèves, tu le regretteras, Kenjiss. Contrairement à toi, je ne m’en prends pas à tes protégés pour m’introduire dans ta Confrérie et la menacer… comme tu le dis si bien. J’ai simplement conseillé à ta chère porte parole de ne pas se mettre en travers de ma route, ses paroles coulaient comme du venin tandis qu’elle fixa de ses yeux presque noirs la jeune Maria. Puis son regard se posa dans le vide, pointant un ennemi qu’elle ne pouvait pas voir. Tu as eu tord de faire ça… crois moi. Je te prouverai bientôt que tu n’es pas le seul à mener une guerre. Je ne joue pas, malgré tout ce que tu peux penser", seulement personne ne s’en rendait encore compte. Mais bientôt, oui… bientôt… tous ses pions seraient en place.

"Quant à cette histoire au British… tu as eu droit à un aperçu de ce qui t’attend la prochaine fois que tu croiseras mon chemin. La prochaine fois, ce sera uniquement… entre toi et moi, Snake. Je me contrefiche de tes élèves, pseudo responsables de ta baraque ou bien encore d’Emmet…"

Elle n’avait que faire de leur majordome, un télépathe certes puissant mais qu’elle aurait déjà envoyé dans la tombe depuis longtemps si elle l’avait réellement voulu.

"Une dernière chose, si j’apprends que tu as manigancé cette mascarade uniquement pour détourner mon attention et t’introduire chez moi, qu’importe tes menaces, mais tu le payeras… et très cher."

Silence et grésillement. Samarah n’eut pas un regard pour l’hologramme 3D en face d’elle. De la tisane à la girofle ? En plus, il semblerait qu’il ait voulu l’empoisonner. Elle détestait ça ! Elle jeta l’oreillette dans les mains de la jeune Slave après avoir résisté à l’envie fulgurante de la désintégrer. Peut-être devrait-elle encore servir, avec un cerveau tortueux comme l’était celui du tatoué, elle devait s’attendre à tout. Mais la mutante avait mieux et surtout plus urgent à faire. Un nettoyage mémoriel des 5 dernières minutes dans le cerveau de leurs chers ‘guides’. Elle se concentra, enragée comme elle l’était à présent, ce ne fut pas difficile et tous les soldats à bords de la jeep n’eurent plus aucun souvenir de cette conversation. Il n’était pas question que l’armée suive l’exemple de la Confrérie et vienne se planter dans son jardin. Voilà un bel effet ‘tabula rasa’ comme aurait pu l’apprécier la sanglante Russe. Si seulement elle avait pu en avoir conscience

"J’espère sincèrement pour vous que Kenjiss n’est pas derrière cette histoire" siffla t elle à l’intention des Confréristes. Ses compagnons n’avaient pas pu entendre le message du mutant mais elle lui avait répondu assez clairement pour qu’ils comprennent la situation.

Ils arrivèrent à destination et Samarah sortit de la jeep tout en interceptant les pensées vives de la Russe. Celle-ci avait visiblement choisi de ne pas insister sur l’intervention de Kenjiss. Elle fit bien. Samarah contenait difficilement sa colère et malgré le contrôle qu’elle s’imposait c’est une voix froide et cassante qui résonna dans l’esprit des mutants, en même temps qu’un léger sentiment d’invasion. Plutôt dérangeant.

*réseau psychique établi. J’ai étendu celui de mon groupe à vos esprits. Vous capterez les pensées directes de tout le monde. Évitez juste de penser tous en même temps. Concernant Kenjiss… cela se règlera entre lui et moi. L’affaire est close* crut-elle bon de préciser pour éviter que cela ne tourne à la cacophonie générale et plus particulièrement en migraine dans son cas.

La mutante n’avait pas l’habitude d’établir et surtout de maintenir un tel réseau de communication sur un nombre aussi élevé de participants. Au moins aurait-elle l’occasion de tester ses capacités qu’elle tentait de maintenir en dessous d’un certain seuil critique. Par précaution. Elle écouta attentivement le plan de la Russe. Ca paraissait risqué, mais faisable. Et puis de toute façon, ils n’avaient pas le choix.

*en effet, ce général nous prend pour des abrutis. Ton plan est jouable mais dangereux. Il faudra aussi mettre hors circuit les détecteurs thermiques. Je peux effectivement masquer ma présence. Celles des autres… moins il y en aura à cacher, plus l’illusion sera efficace sur la durée. S’ils sont 3 à l’intérieur, autant n’envoyer que 3 d’entre nous*

Samarah pouvait en effet contrôler beaucoup de choses mais quand il s’agissait de personnes, plus il y en avait, plus la manœuvre s’annonçait délicate et moins fiable à long terme. Surtout qu’elle devrait maintenir leur réseau interne d’échange d’informations en même temps. La mutante pourrait s’estimer heureuse si elle ne se chopait pas un mal de crâne carabiné avant la fin de la journée.

*mais avant de se lancer là-dedans, assurons nous d’abord qu’il y a bel et bien quelqu’un à l’intérieur et surtout si ce quelqu’un veut sortir… on leur exposera le plan de fuite après*

Elle avait ravalé son orgueil mais il lui restait toujours sa méfiance. Guidée par sa colère, la mutante s’avança et lança un appel franc et direct télépathique aux trois individus dans la baraque. Ses pensées résonneraient dans leur crânes aussi froidement que sa voix, désagréable. Du moins s’il y avait bel et bien âme qui vive à l’intérieur

*vous m’entendez là-dedans ?lequel d’entre vous se prétend à la tête de votre groupe ?*

Elle entreprit de sonder les lieux également, pour vérifier la marge d’erreur des derniers 40% des détecteurs thermiques…

Avouons-le… pour la première fois de sa vie, Terry aurait bien voulu expédier Kenjiss dans les étoiles. Le réduire au silence. Afin qu’il n’aggrave pas leur situation. Parce que sa révélation ne tombait pas vraiment à pic… Et outre le fait qu’il s’en serait bien passé, celle-ci risquait de tous les tuer sur le champ. Provoquer délibérément Samarah Lemington… Leur leader avait réellement perdu la tête. Du moins, Terry le pensa sincèrement lorsqu’il suivit la conversation holographique. A mesure que le tatoué parlait, son teint blanchissait. Certes, il avait plus ou moins une bonne raison de lui en vouloir, la Cerbère l’ayant plus ou moins amoché lors de leur rencontre au British… mais de là, à lui donner l’occasion de les envoyer au casse pipe… Non, vraiment, entouré de dingues et au bord d’un précipice dont l’issue fatale ne serait vraisemblablement que la mort, il n’avait pas besoin en prime d’une Cerbère énervée. Pas du tout, même !

Or, il aurait franchement fallut être le dernier des abrutis pour ne pas s’apercevoir que la mutante fulminait de rage. Et surtout, qu’elle se retenait de réduire son entourage proche à l’état de cendres. Il serra les dents. Il allait devoir sérieusement discuter avec Kenjiss. Son comportement ces dernières semaines ne lui ressemblait pas du tout. Et si d’ordinaire, le caméléon laissait Kenjiss gérer la baraque comme il l’entendait, le jeune homme estimait qu’il avait dépassé les bornes. Quand leur survie était menacée, il y avait une limite à ne pas franchir. Et le tatoué ne semblait pas s’en rendre compte. Que lui était-il donc passé par la tête ? Et surtout dans la sienne pour avoir accepté de participer à cette mission qui s’annonçait de plus en plus comme un véritable suicide collectif ! Terry se maudit. Par moment, il était vraiment trop naïf. Tout ce cirque pour un simple… avertissement ?! Non… il devait y avoir autre chose. Mais quoi ? Intérieurement, Terry se mit à espérer lui aussi que Kenjiss n’était pas l’investigateur de cette mise en scène. Parce qu’alors, ce ne serait pas l’armée américaine qui les anéantirait, mais bel et bien une mutante névrosée, à quelques mètres de lui.

Terry lança prudemment un œil curieux dans sa direction lorsque l’oreillette se tut. Le visage fermé de la mutante ne laissa rien paraître, mais ses yeux noirs parlaient pour elle. Ce regard qui vous transperçait aussi sûrement qu’une lame… il éveilla dans sa mémoire l’impression d’un souvenir fugace, qui s’évanouit rapidement. Une fois encore, Terry sentit qu’il était passé tout près, qu’il avait manqué ‘quelque chose’. Mais cette sensation disparut rapidement et il fut brutalement ramené à la réalité lorsque les moteurs se coupèrent. Maria ne perdit pas de temps et leur exposa son plan. Terry vécut la seconde intrusion mentale du Cerbère comme la première. Mal. Similaire à une agression, il avait l’impression qu’elle transperçait froidement son esprit. Mais le caméléon se tut, écoutant simplement les instructions.

Mis à part le fait que leur plan échouerait sûrement pour une raison ou l’autre, l’idée en elle-même n’était pas forcément mauvaise. Et en l’occurrence, il n’avait de toute façon rien d’autre à proposer. Au pire, ils aviseraient dans le feu de l’action. Impassible, le mutant répondit mentalement

*Pas de problème pour ma part… je peux disparaître. En revanche, s’il faut camoufler quelqu’un d’autre, je n’ai jamais tenté le camouflage tactile groupé. Et j’ignore si c’est à ma portée. Il vaut mieux se fier aux capacités de Samarah*

En outre, il se garda bien de préciser que la perspective de se retrouver nu comme un ver ne l’enchantait pas du tout.

*Quant aux détecteurs, je pense que nous avons parmi nous un mutant capable de s’en charger*

Précisa-t-il en fixant Deklan furtivement avant de poser son regard sur Maria et Twikjeya. Le maître du sable pourrait certainement perdre quelques uns de ses grains dans ces fichus appareils révélateurs de position.

*Maintenant, reste à savoir qui se rendra effectivement à l’intérieur. Avec mon camouflage je n'ai pas besoin d'une protection supplémentaire si les détecteurs sont mis hors service. On peut donc prendre quelqu'un en plus...*

Les compères n'agirent pas, mais ce fut le moment que choisirent les deux mastodontes, j'ai nommé leurs accompagnateurs militaires, pour faire demi tour et s'éloigner avec leurs jeeps dans un nuage de poussière. Les mutants étaient désormais livrés à eux même, seules silhouettes en vue dans les environs, bien qu'il y avait fort à parier que les soldats les observaient au moins autant qu'ils surveillaient la cabane...

Samarah Lemington eut quant à elle une réponse. Aussi étrange qu'ait pu paraitre sa voix résonnant dans le crâne des terroristes, l'un d'eux réussi visiblement à organiser ses pensées pour que la télépathe les capte...

**Pas trop tôt ! Institut ? ** La voix était calme, presque trop sûre d'elle même... **On est quatre dans la cabane. Si vous voulez bien attaquer les positions d'artillerie qui nous empêchent de bouger, on pourra sortir en trombe... Transmettez point d'évacuation, on se retrouvera là bas. Nous vous laisserons l'honneur de déclencher les bombes une fois en sécurité. **