Forum de Jeux de Rôle Futuriste - Inspiré des Mutants de Marvel (X-Men)
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L’animation qui régnait ce soir-là à l’Institut était pour le moins inhabituelle, du moins comparée aux soirées si calmes que la bâtisse avait l’habitude d’offrir. Au dehors, la neige tombait drue, légèrement emportée dans un ballet rêveur en symbiose avec la bise glaciale. Le lac était devenu une véritable patinoire mais personne ne s’était encore avisé d’en tester la solidité. La pelouse, les arbres, les pourtours du manoir, tout était recouvert d’un manteau cristallin et d’un blanc duveteux. Vue de l’extérieur, la résidence, dont les multiples fenêtres éclairées brillaient dans l’obscurité, avait quelque chose de chaleureux.
Artie soupira et s’affala sur sa chaise, un petit sourire flottant encore sur ses lèvres. Dans l’immense salle à manger de l’Institut, les rires et les éclats de voix retentissaient avec gaieté de partout autour de l’immense banquet organisé en l’honneur de cette soirée de Noël. Le garçon au teint rivalisant avec la Lune, pour sa part, se contentait de rire aux plaisanteries de ses camarades, pour la plupart plus âgés que lui. Le plat principal venait à peine d’être entamé qu’il n’avait déjà plus faim. Il se sentait néanmoins parfaitement installé ici, au chaud, parmi des gens qui ne le jugeaient pas pour ce qu’il était, à rire avec eux.
Il jeta un coup d’œil à l’occupant de sa droite. Accoudé à la table, affichant une expression d’amusement poli, Ulrich regardait les autres de ses yeux aux pupilles étrangement affûtées. Artie avait remarqué qu’elles s’affinaient de plus en plus. Elles avaient maintenant une forme ovale, taillées en pointe aux extrémités verticales. Et quelques autres changements subtils étaient en train de s’opérer chez le mutant en devenir, et dont Artie était sûr d’être le seul à avoir remarqué : les ongles de ses doigts s’allongeaient de plus en plus d’une façon étrange, comme des griffes. Pendant un instant, Artie avait entraperçu ses canines lorsqu’il avait ouvert la bouche pour parler. Elles s’acéraient, elles aussi. Sa mutation commençait à le transformer.
Ulrich s’appuya contre le dossier de sa chaise et mit les mains dans ses poches. Sa troisième assiette de dinde venait d’être vidée et, alors qu’un de leurs camarades excitait leur groupe en faisant le pitre, il tourna la tête pour échanger un regard avec Artie. Il haussa les sourcils. Artie reconnut là un signe de son exaspération. Le jeune homme pâle n’aimait pas tellement non plus toute cette agitation. Le manoir entier battait son plein estival.
- Tu viens ? demanda Artie en se penchant vers son ami.
Sans attendre de réponse, il se leva, repoussa sa chaise et se dirigea vers le hall d’entrée, Ulrich sur ses talons. Il y avait du monde un peu partout, et lui voulait juste être tranquille. Il lança un coup d’œil à son compagnon qui lui désigna une fenêtre d’un signe de tête. On voyait les flocons zigzaguer dans le bleu de la nuit.
- Un petit tour dehors ?
Artie acquiesça avec un large sourire. Malgré le froid nocturne, le parc était l’endroit où il désirait être en ce moment-même, isolé du bruit ambiant, du monde, effacé de l’esprit des autres, seul avec son meilleur ami. Ils montèrent dans leur chambre commune. Artie enfila une veste d’hiver noire et violet – sa couleur favorite –, un bonnet et des gants en laine. Il noua une écharpe en Celio autour de son cou mutilé et sortit en compagnie de son ami par les grandes portes en bois de l’Institut.
Immédiatement, le froid s’immisça dans son cou et il rentra la tête dans les épaules. Ils descendirent l’allée jusqu’à la pelouse, ou du moins l’endroit où elle se trouvait habituellement, la neige crissant sous leurs pas. Artie aimait contempler le tableau noir de la nuit et les flocons qui s’en détachaient, leur mouvement oblique se répétant inlassablement dans l’air. Les arbres, gardiens du château, se dressaient malgré les intempéries à travers tout le parc, les branches couvertes d’un paletot glacial, l’air à la fois sinistre et protecteur.
Artie expira un grand coup. Leur souffle formait de petits nuages de condensation qui se dissipaient aussitôt dans l’air. Ulrich, mains dans les poches, marchait à ses côtés, frissonnant, le regard baissé sur la neige devant lui, lisse et encore propre de toute profanation. Même si Artie avait trouvé l’ambiance intérieure peu supportable, le silence du dehors n’était pas mieux, au final. Regardant le bout de ses chaussures couvertes de neige, il lança :
- Et toi, tes parents vont t’envoyer quelque chose pour Noël ? Du coin de l’œil, il vit Ulrich hausser les épaules :
- J’en sais rien. Je n’ai rien demandé pour Noël mais c’est possible.
Artie le soupçonnait de mentir. Mais il savait que son ami ne voulait pas le dire pour ne pas l’indisposer, lui qui n’avait plus vraiment de famille à l’heure actuelle. Il chassa cette pensée de sa tête et sourit :
- En tout cas moi, je t’ai acheté quelque chose.
Ulrich redressa la tête :
- Sérieux ? C’est quoi ? Artie éclata de rire. Au loin dans le parc, il remarqua qu’un groupe de jeunes mutants se livrait à une bataille de boules de neige acharnée.
- Ce n’est plus un cadeau si je te le… woah !
Il sentit son pied glisser et perdre l’équilibre. Il bascula en arrière, le plafond des étoiles balayant son champ de vision, et s’attendit à recevoir un choc, mais une main, celle d’Ulrich, l’agrippa et il tomba dans la neige. Son ami, emporté dans l’élan, s’écroula sur lui avec une exclamation de surprise. Artie fut aplati dans la neige sous son poids mais ce n’était pas douloureux. Après un court instant de silence, l’absurde de la situation le fit partir dans un rire qui se mua très vite en un éclat espiègle qui résonna dans le parc. Il faillit s’arrêter lorsqu’il entendit, pour la première fois depuis leur rencontre, là-haut, dans leur chambre, Ulrich l’accompagner dans son fou rire d’un ton à la fois léger et grondant. Artie en profita pour observer son expression rieuse, comme un astrologue se hâte d’admirer le passage annuel d’une comète.
Au bout d’un moment, leurs rires, progressivement, tels des bougies, se consumèrent dans l’air de la nuit puis finirent par s’éteindre. Artie en avait les larmes aux yeux. La neige lui gelait le dos en même temps qu’Ulrich lui tenait chaud. Le regard intimidant et les iris félins croisèrent le brun des yeux d’Artie qui baissa immédiatement le regard. Ses joues devinrent rouges sans pour autant que c’eût un rapport avec le froid. Ulrich, lui, gardait le teint bien mat. Il semblait amusé par la situation. Artie, pris d’un soudain accès d’audace, fouilla dans l’ambre de la pupille de son ami et y trouva une étrange lueur y brillant.
Ulrich eut un petit sourire.
- Joyeux Noël, Artie.
A ces mots, il se pencha légèrement en avant et joignit ses lèvres à celles d’Artie. Ce dernier eut un spasme et il sentit un feu mordant envahir ses joues. Immédiatement, la première chose qui lui traversa l’esprit fut que quelqu’un risquait de les surprendre ainsi mais il se rendit aussitôt compte que ça ne lui importait pas beaucoup et se détendit. Pendant un instant, un ultime instant, Artie oublia qui il était et les soucis qui l’habitaient. C’était comme s’ils s’étaient humblement écartés pour laisser place au plaisir et au bonheur, même si le jeune garçon savait qu’ils en auraient vite assez et les chasseraient pour reprendre leur place.
Les secondes semblaient durer une éternité, mais lorsque le contact fut rompu, Artie se surprit à désirer qu’il fut maintenu plus longtemps. A présent, le froid n’avait plus aucun impact sur lui. Il aurait pu faire fondre la neige sous lui. Ulrich cligna des yeux.
- Désolé, ton cadeau est un peu en avance cette année.
Il se releva et Artie suivit le crissement de ses pas s’éloignant en direction de l’Institut. Il resta là, allongé dans la neige, immobile, les cris des élèves s’amusant plus loin retentissant à travers le parc. Il était incertain de savoir quand il se réveillerait dans son lit pour retourner en cours durant une banale journée de plus. Mais rien ne se passa. Alors son visage se fendit en un large sourire ; ses lèvres, fortes d’une sensation nouvelle et puissante, s’étirèrent et il resta ainsi figé, à regarder les étoiles et ce fut avec quelques secondes de retard qu’il remarqua qu’une étoile filante venait de faire son apparition dans le ciel.